Page:Jaurès - Histoire socialiste, V.djvu/72

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

artillerie et signaient une déclaration portant : « Nous déclarons solennellement à la Convention nationale et à la France entière nous soumettre à la République une et indivisible ». Il est vrai que, de retour à son quartier général, à Belleville, à une douzaine de kilomètres au nord de la Roche-sur-Yon, Charette, après cette signature, disait, le 18 février, à ses officiers réunis : « J’ai des vues que vous approuveriez si vous les connaissiez. Vive le Roi ! » (Bittard des Portes, Charette, p. 413).

Les rebelles gagnaient le maintien de leurs cadres, du répit et de l’argent. Tout le monde, il est vrai, ne fut pas dupe ; le 5 ventôse (23 février), Hoche écrivait au représentant Bollet : « Ne craignez-vous pas que les gardes territoriales, que vous formez dans la Vendée, ne soient un noyau d’armée auquel viendront se réunir les brigands, lorsque l’idée de reprendre les armes leur passera par la tête ? » (Chassin, ibid, p. 165). Le 9 (27 février), Charette, Sapinaud et d’autres officiers vendéens assistaient à Nantes à une fête civique. Ces hommes de conviction portaient cette fois la cocarde tricolore ; de l’aveu du secrétaire de Charette, Auvynet (Éclaircissements historiques, publiés à la suite des Mémoires de Mmes de Bonchamps et de la Rochejaquelein dans la Collection des Mémoires relatifs à la Révolution française, de Baudouin, t. XXVII, p. 499) « quelques-uns donnaient le spectacle public de la crapule et de l’ivrognerie »… « Les insurgés suivirent l’exemple des Hébreux lorsqu’ils empruntèrent les vases de l’Égypte… Ils emportèrent les rideaux des lits qu’on avait eu l’attention de leur fournir » (idem, p. 500). Le 24 ventôse (14 mars), Delaunay, Ruelle et Bollet présentèrent les stipulations de la Jaunaie à la Convention. Ruelle osa parler de la « loyauté et l’honneur » de Charette dont il savait cependant le prix, et les arrêtés des représentants furent ratifiés à l’unanimité sans délibération. Le 3 ventôse (21 février), avait été votée, avec l’espoir d’apaiser certains rebelles de l’Ouest, la loi qui mettait définitivement fin à la Constitution civile du clergé et qui organisait la liberté des cultes sous le régime de la séparation de l’Église et de l’État.

Le 10 germinal (30 mars), près de Rennes, au château de la Prévalaye, commençaient avec Cormatin des conférences relatives aux Chouans. Elles se terminaient à la ferme de la Mabilais, également près de Rennes, le 1er floréal (20 avril), par une déclaration de Cormatin et des arrêtés des représentants copiés sur ceux de la Jaunaie, sauf de très légers changements : Cormatin devait toucher un million et demi au lieu de deux millions ; le lendemain, il arborait à Rennes les couleurs nationales. Les arrêtés de la Mabilais étaient approuvés par la Convention le 8 floréal (27 avril).

Restait Stofflet. Celui-ci, malgré un manifeste lancé contre le décret d’amnistie du 12 frimaire, avait eu, le 14 pluviôse (2 février), avec le représentant Menuau, une entrevue au pont du Lys, près de Vihiers (Maine-et-Loire) ; il ne s’était pas montré opposé à un accord, mais il réclamait à cet