Page:Jaurès - Histoire socialiste, VI.djvu/585

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que son prix marchand ne fut pas plus élevé : le sucre de betterave dont je mets aujourd’hui des échantillons sous les yeux de Votre Majesté remplit toutes ces conditions et ce ne sont pas, Sire, de simples essais de laboratoire qui ont introduit ces résultats, ce ne sont pas des aperçus destinés seulement à faire partie du domaine de la science ; ici la fabrication est assez considérable et assez étendue pour garantir des succès, l’art a été parfait presque aussitôt qu’il a été créé, plusieurs entreprises se font remarquer en ce moment. Un regard de Votre Majesté assurera leur multiplication jusqu’au terme nécessaire pour fournir à la consommation de l’Empire. Tout semble présager à ce nouveau travail les plus heureux résultats, l’extraction du sucre de betteraves est moins difficile à opérer que celui des cannes même ; la plante qui fournit ce sucre est d’une culture aisée, elle convient à la plus grande partie des terres de la France, particulièrement aux départements du Nord, pour lesquels le climat semblait ne devoir jamais laisser espérer un semblable produit. La betterave est une des meilleures plantes qu’on puisse employer à la nourriture des bestiaux, elle est des plus productives, et elle exerce une heureuse influence sur l’amendement des terres et les dispose favorablement à la production des céréales. L’extension de sa culture doit être assurée par de si grands avantages et d’ailleurs la portion de terrain nécessaire à fournir les betteraves dont on pourrait extraire tout le sucre qu’il faut à notre consommation n’excédant pas trente cinq mille hectares, il suffit que chacun des départements de l’Empire fournisse un contingent de culture de ce genre, depuis cent hectares, pour ceux qui sont les moins propres à ce produit, jusqu’à quatre cents hectares, pour ceux que la nature a le plus favorisés sous ce rapport. Il faut deux cents hectares de terrain pour obtenir 88 800 kilogrammes de sucre, et former un grand établissement de ce genre ; en divisant les départements de l’Empire en quatre liasses, ainsi que j’ai l’honneur de le proposer à Votre Majesté, ceux de première classe, au nombre de 48, cultiveraient chacun 400 hectares et fourniraient, à l’entretien de deux grands établissements, ceux de seconde classe au nombre de 25 en cultiveraient seulement 300 et fourniraient à l’entretien d’un grand et d’un petit établissement, ceux de troisième classe et de quatrième cultiveraient 200 et 100 hectares et auraient des ateliers proportionnés.

« Je ne puis douter, Sire, que partout les préfets et leurs administrés n’aillent au delà du but qui leur est assigné et l’intérêt privé, si puissant encore pour déterminer les entreprises particulières, agira efficacement dans cette circonstance, puisqu’il est démontré, d’après les procédés dont Votre Majesté m’a autorisé à publier la connaissance, que le kilogramme de sucre brut ne coûtera plus que 98 centimes et que raffiné il reviendra au plus à un franc quarante centimes.

« Un des moyens les plus puissants, sire, de hâter et de consolider l’extension de cette heureuse découverte, serait de donner aux propriétaires et