Page:Jaurès - Histoire socialiste, X.djvu/149

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question était ouverte depuis 1840, les Anglais recherchant des positions commerciales avantageuses ; les Français protégeant les missions catholiques. Par le traité de Nankin 1842, les marchands anglais s’étaient installés à Chang-hai, à Fou-Tchéou ; et ils étaient devenus maîtres de Hong-Kong ; par le traité de Whampoa (1844), les Français s’étaient donné la mission de protéger les catholiques en Chine. Les Anglais commerçants surent rappeler aux Français catholiques leurs devoirs sacrés et tourner, au mieux de leurs intérêts, leur scrupule à les remplir. En 1856, les Chinois, ayant saisi un bateau portant pavillon anglais, se virent déclarer la guerre. Un missionnaire, l’abbé Chapdelaine, ayant été mis à mort, la France se joignit à l’Angleterre. Lord Elgin et le baron Gros, ambassadeurs extraordinaires, appuyés par une force navale imposante, après avoir bombardé les forts de Ta-kou, étaient arrivés jusqu’à Tien-Tsin et avaient imposé aux mandarins chinois le double traité de juin 1858, accordant des avantages commerciaux, des indemnités de guerre, des réparations aux protégés de la France, et surtout la présence continue de représentants des deux nations à Péking.

Or, en juin 1859, quand ces représentants, Bruce et de Bourboulon étaient venus pour occuper leur poste, ils avaient trouvé l’embouchure du Peï-Ho barrée, et le feu des forts de Takou avaient empêché leur escadre de la franchir.

Alors, une nouvelle expédition avait été résolue. Sous la conduite du général Cousin-Montauban et de son brillant État-Major, 8.000 Français allaient aider les 13.000 Anglais de sir Hope Grant à rétablir en Chine le prestige européen. Lord Elgin et le baron Gros s’étaient réembarqués.

En juillet 1860, Ta-kou fut emporté, en août Tien-tsin. En septembre, le massacre d’officiers chargés de protéger les plénipotentiaires fit décider la marche sur Pékin. Le bataille de Pa-li-kao livra la route. Le 5 octobre l’armée s’emparait des portes de la capitale, Le 18 octobre, par un acte de vandalisme insensé, lord Elgin ordonnait de mettre le feu au Palais d’Eté, à la merveilleuse résidence, où se trouvaient entassés les trésors de la dynastie mandchoue : ainsi devait être frappé l’orgueil du souverain, qui n’avait pas voulu recevoir les représentants de l’Europe !

Le 24 octobre, la Chine se décidait à traiter. Le prince Cong signait deux conventions avec lord Elgin et le baron Gros. Des avantages commerciaux étaient accordés aux deux nations ; mais l’Angleterre obtenait en outre la cession d’un territoire destiné à la sûreté de Hong-kong et la France, protectrice du culte catholique, obtenait la restitution aux chrétientés de leurs établissements religieux ou de bienfaisance et de leurs cimetières.

Les puissances européennes aidèrent la dynastie mandchoue à vaincre la rébellion des Taï-Ping, soutenant une dynastie rivale. Puis, la paix rétablie dans le Céleste Empire, elles s’occupèrent de tirer tous les avantages possibles des conventions de Pékin. L’Angleterre avait solidement établi l’autorité de son représentant ; et sir Robert Hart, pour le plus grand profit de