du feu de la technique nouvelle. L’idéal serait donc une bataille où l’armée, établie dans une forte position défensive, et repoussant d’abord l’assaut de l’ennemi, le foudroierait enfin par une offensive finale. C’est cumuler alors les bénéfices tactiques de la défensive et ceux de l’offensive. Ce n’est en un sens que l’offensive mieux préparée. C’est, selon le mot de Clausewitz lui-même, « l’ajournement prémédité de l’acte décisif, de l’acte offensif » qui se détend ensuite et se déploie avec plus de force.
Mais l’état-major allemand n’est point embarrassé pour dire que c’est là une combinaison idéale, difficile sans doute à réaliser, souvent à cause de sa perfection même. De rares rencontres des événements ou une merveilleuse habileté de génie, comme celle de Napoléon à Austerlitz, peuvent à de longs intervalles amener cette combinaison. Mais on n’y peut subordonner la conduite générale des choses. Or une armée qui a le propos d’envahir le territoire de l’adversaire, et de surprendre celui-ci par la réalisation soudaine du coup décisif, cette armée-là ne peut s’attarder à réussir ce jeu de patience et de calcul. C’est à elle à bousculer l’adversaire, même au prix des plus terribles dépenses de forces. Et l’offensive générale de sa stratégie a pour conséquence à peu près inévitable l’offensive tactique, l’offensive du détail dans les rencontres, dans les batailles. II a suffi que Clausewitz ait eu le sens de la grande action hardie, rapide, déchaînée, accablante, pour que ses formules de défensive soient emportées dans le torrent qu’il a précipité lui-même :
Ce qui rend durable l’œuvre de Clausewitz, dit l’état-major prussien, c’est, en dehors de sa haute importance morale et psychologique, la valeur de Vidée d’anéantissement qui jaillit de partout.
Ce que les théoriciens allemands veulent retenir de Clausewitz, c’est qu’il a compris Napoléon et mis en pleine lumière les enseignements de la guerre napoléonienne, parmi lesquels la bataille d'anéantissement occupe la première place.
