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Page:Jaurès - L'Armée nouvelle, 1915.djvu/25

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CHAPITRE II
L'active et la réserve.


Le vice essentiel de notre organisation militaire, c'est qu'elle a l'apparence d'être la nation armée et qu'en effet elle ne l'est point ou qu'elle l'est à peine. Elle impose à la nation une lourde charge, mais elle n'obtient pas de la nation toutes les ressources défensives que la nation vraiment armée et éduquée pourrait fournir avec une moindre dépense de temps et de force. La loi institue le service obligatoire et égal pour tous les citoyens. Elle n'admet ni exception, ni dispense : elle étend ses prises sur tous les hommes valides pendant la plus grande partie de leur vie. En vertu de l'article 32 de la loi, tout Français reconnu propre au service militaire fait partie successivement de l'armée active pendant deux ans, de la réserve de l'armée active pendant onze ans, de l'armée territoriale pendant six ans, de la réserve de l'armée territoriale pendaht six ans. Tous les citoyens passent deux ans à la caserne; tous les citoyens sont tenus, après leur sortie du régiment, à des appels périodiques, à des manœuvres et exercices. Riches et pauvres, patrons et ouvriers, les plus raffinés des intellectuels et les plus ignorants des hommes simples, sont soumis à la même obligation, participent comme soldats à la même vie, portent le même fardeau. Toutes les professions, toutes les classes sont confondues sous la même loi et la même discipline, dans le même devoir, le même sacrifice, le même péril ; même la faiblesse physique, si elle n'excède pas un certain degré, ne dispense pas le citoyen de tout effort militaire ; le débile, s'il n'est pas pleinement invalidé, s'acquitte dans les services auxiliaires de sa dette envers la commune patrie qui a proclamé le