caste, l’organisation militaire n’était plus capable, par son ressort propre, par sa force interne, d’opposer une résistance sérieuse à la démocratie. Les objections des grands chefs et des Comités prétendus techniques à la loi de deux ans ont été emportées comme un fétu de paille, et si maintenant quelques généraux tiennent en échec l’esprit de la loi, c’est d’une manière oblique et presque occulte ; ils ne se prêtent pas aux simplifications de manœuvres et aux procédés d’éducation plus libres et plus directs qu’implique la réduction de la durée du service. Mais ils n’osent pas protester tout haut contre la lettre de la loi. C’est la bourgeoisie républicaine et radicale, prise de peur devant les conséquences sociales d’une réforme profonde, qui a arrêté à mi-chemin la réforme des Conseils de guerre. C’est elle qui a sanctionné la suppression du recrutement régional par peur d’une confusion de l’armée et du peuple qui obligerait l’ordre social à de plus rapides transformations.
Au moment précis où nous sommes, ce n’est pas la force propre du mécanisme militaire qui arrête la démocratie. C’est la démocratie, plus qu’à demi paralysée encore par les influences égoïstes d’une bourgeoisie timorée, qui arrête ou ralentit la nécessaire évolution de l’institution militaire. Et toute l’histoire française, depuis la Révolution surtout, toute l’histoire française depuis la République se résume, en ce qui concerne les rapports de l’armée et de la démocratie, en ces deux faits : l’armée est, en France, une force subordonnée ; elle ne constitue, à aucun moment, une force dirigeante, mais, par son mécanisme actuel dont le fonctionnement échappe beaucoup trop à l’action de la volonté populaire, elle est un instrument trop facile aux mains du pouvoir de répression et elle constitue à la longue une sorte d’administration fermée, dont l’esprit corporatif se développe en militarisme.
L’institution militaire est donc maniable à la démocratie. Et si le prolétariat, développant son action sur la démocratie, intervient pour transformer l’institution militaire, s’il assume dans l’institution militaire transformée un rôle