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Page:Jaurès - L'Armée nouvelle, 1915.djvu/97

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C'est parce qu'ils sentaient, dans l'âme de toute l'armée, cette force profonde, que les chefs, militaires et civils, se risquaient à annoncer d'avance la victoire à la Convention. C'est pour cela que le 9 octobre, le général Jourdan osait écrire au ministre de la guerre :

Je compte attaquer le 12. La cause que je défends est si belle que je crois le succès inéluctable.

Et le 13 octobre, au seuil même de la bataille, il écrivait de son quartier général d'Avesnes :

Suivant tous les rapports, les forces ennemies se montent à 64 000 hommes d'infanterie et 15 000 hommes de cavalerie. Je compte sur le courage et l'énergie des républicains que je commande : un doit en valoir deux.

De toutes ces assurances, il aggravait, en cas de défaite, sa propre responsabilité ; mais l'élan d'enthousiasme et de confiance emportait tout. C'est du même ton de certitude que Carnot écrivait au Comité de Salut Public, le 9 octobre :

L'ennemi fait de grands mouvements ; l'affaire sera chaude, mais nous vaincrons et la patrie sera sauvée.

Il écrit le 14 :

Croyez que ça ira.

Il ne s'assurait pas seulement sur la position plus avantageuse qu'occupaient les troupes françaises, mais sur « le courage de lion » des combattants révolutionnaires.

Nos troupes sont aussi impatientes de vaincre que nous de les mener à la victoire ; demain elles seront satisfaites.

Et lorsque, le lendemain, tous ceux qui tombaient sur le champ de bataille, « tant officiers que soldats », ainsi que le note Carnot, criaient en mourant « Vive la République ! » c'est bien le souffle profond de leur âme qu'ils exhalaient ainsi. Ils attestaient dans ce cri unanime la communauté morale de l'armée, des soldats et des chefs, enfin réalisée après des difficultés terribles. Ils rendaient hommage dans la mort à la force immortelle de l'idée qui,