Page:Jean Paul - Sur l’éducation, 1886, trad. Favre.djvu/16

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faux pas ! Qu’il supporte avec patience les fautes que nécessite l’apprentissage de la liberté ; qu’il ne voie pas dans ces fautes la condamnation de son système, mais qu’il les regarde comme d’inévitables expériences, plus utiles à l’homme que les plus sages leçons de tout autre maître ! En ne comprenant pas l’importance de la liberté et de l’action personnelle de l’élève, l’éducateur se prépare à lui-même de cruels désenchantements, et à son élève une vie plus ou moins inutile. En vain s’efforce-t-il de développer ce qui n’existe pas ; tout ce qu’il croit ajouter à la nature de l’enfant n’est qu’un travail de surcharge que la vie anéantit aussitôt, sans que l’éducation lui ait appris à tirer parti de ce que la nature lui avait donné.

Jean-Paul distingue entre l’individualité de l’intelligence et celle du cœur : il est d’avis qu’il n’y a qu’à laisser grandir celle-là qui, d’ailleurs, poursuit son objet malgré toutes les influences contraires : c’est « une mélodie » à laquelle tout sert d’accompagnement, que tout contribue à accentuer et dont les sons s’épurent et s’enflent indéfiniment. Dans la vie morale, au contraire, toute qualité, toute force prédominante tend à détruire l’harmonie : il faut donc lui donner le contrepoids nécessaire en développant la force contraire. C’est ici que la belle pensée de Pascal sur les extrêmes trouverait sa place : « On ne montre pas sa grandeur pour être à une extrémité, mais bien en touchant les deux à la fois et remplis-