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Page:Jean de Léry - Voyage au Brésil - Gaffarel vol 1, 1880.djvu/137

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ministres ne l’eussent empesché, car je di derechef que cela est faux.

Or pour retourner à mon propos, incontinent apres ceste Cene de Pentecoste, Villegagnon declarant tout ouvertement qu’il avoit changé l’opinion qu’il disoit autrefois avoir euë de Calvin : sans attendre sa response, qu’il avoit envoyé querir en France par le ministre Chartier, dit que c’estoit un meschant heretique desvoyé de la foy : et de fait dés lors nous monstrant fort mauvais visage, disant qu’il vouloit que le presche ne durast plus que demie heure, depuis la fin de May, il n’y assista que bien peu. Conclusion, la dissimulation de Villegagnon nous fut si bien descouverte, qu’ainsi qu’on dit communément, nous cognusmes lors de quel bois il se chauffoit. Que si on demande maintenant quelle fut l’occasion de ceste revolte quelques uns des nostres tenoyent que le Cardinal de Lorraine et autres qui luy avoyent escrit de France par le maistre d’un navire, qui vint en ce temps là au Cap de Frie, trente lieuës au deçà de l’Isle où nous estions, l’ayant reprins fort asprement par leurs lettres, de ce qu’il avoit quitté la religion Catholique Romaine, de crainte qu’il en eut, il changea soudain d’opinion. Toutesfois, j’ay entendu depuis mon retour, que Villegagnon devant mesme qu’il partist de France, pour tant mieux se servir du nom et auctorité de feu monsieur l’Admiral de Chastillon, et aussi pour abuser plus facilement tant l’Eglise de Geneve en general que Calvin en particulier (ayant comme on a veu au commencement de ceste histoire escrit aux uns et aux autres, à fin d’avoir gens qui l’allassent trouver), avoit prins advis avec ledit Cardinal de Lorraine, de se contrefaire de la Religion. Mais quoy qu’il en soit, je puis asseurer, que lors de sa revolte, comme s’il eust