Aller au contenu

Page:Jean de Léry - Voyage au Brésil - Gaffarel vol 1, 1880.djvu/161

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

cuivre doré aux deux bouts du mord ou frain de la bride d’un cheval.

Que si outre tout ce que dessus, nos Bresiliens vont en guerre, ou qu’à la façon que je diray ailleurs, ils tuent solennellement un prisonnier pour le manger : se voulans lors mieux parer et faire plus braves, ils se vestent de robes, bonnets, bracelets, et autres paremens de plumes vertes, rouges, bleues, et d’autres diverses couleurs, naturelles, naives et d’excellente beauté. Tellement qu’apres qu’elles sont par eux ainsi diversifiées, entremeslées, et fort proprement liées l’une à l’autre, avec de tres-petites pieces de bois de cannes, et de fil de cotton, n’y ayant plumassier en France qui les sceust gueres mieux manier, ny plus dextrement accoustrer, vous jugeriez que les habits qui en sont faits sont de velours à long poil. Ils font de mesme artifice, les garnitures de leurs espées et massues de bois, lesquelles aussi ainsi decorées et enrichies de ces plumes si bien appropriées et appliquées à cest usage, il fait merveilleusement bon voir.

Pour la fin de leurs equippages, recouvrans de leurs voisins de grandes plumes d’Austruches (qui monstre y avoir en quelques endroits de ces pays-là de ces gros et lourds oyseaux, où neantmoins, pour n’en rien dissimuler, je n’en ay point veu) de couleurs grises, accommodans tous les tuyaux serrez d’un costé, et le reste qui s’esparpille en rond en façon d’un petit pavillon, ou d’une rose, ils en font un grand pennache, qu’ils appellent Araroye : lequel estant lié sur leurs reins avec une corde de cotton, l’estroit devers la chair, et le large en dehors, quand ils en sont enharnachez (comme il ne leur sert à autre chose), vous diriez qu’ils portent une mue à tenir les poulets dessous, attachée sur leurs fesses. Je diray plus