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Page:Jean de Léry - Voyage au Brésil - Gaffarel vol 1, 1880.djvu/48

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secrettes, qui furent cause que quelques-uns des nostres furent par eux tuez. Mais partie de ces sedicieux estans prins furent executez, et leurs corps donnez pour pasture aux poissons ; les autres se sauverent, du nombre desquels estoit ledict Richier, lequel, bien tost apres, se vint rendre Ministre à la Rochelle : là où j’estime qu’il soit encore de present. Les Sauvages irritez de telle tragedie, peu s’en fallut qu’ils ne se ruassent sur nous, et missent à mort ce qui restoit. »

Voila les propres paroles de Thevet, lesquelles je prie les lecteurs de bien notter. Car comme ainsi soit qu’il ne nous ait jamais veu en l’Amerique, ny nous semblablement luy, moins, comme il dit, y a-t-il esté en danger de sa vie à nostre occasion : je veux montrer qu’il a esté en cest endroit aussi asseuré menteur qu’impudent calomniateur. Partant à fin de prevenir ce que possible pour eschapper il voudroit dire, qu’il ne rapporte pas son propos au temps qu’il estoit en ce pays-là, mais qu’il entend reciter un fait advenu depuis son retour : je luy demande en premier lieu, si ceste façon de parler tant expresse dont il use, assavoir, Les Sauvages irritez de telle tragedie, peu s’en fallut qu’ils ne se ruassent sur nous, et missent à mort le reste, se peut autrement entendre, sinon que par ce nous, luy se mettant du nombre, il vueille dire qu’il fut enveloppé en son pretendu danger. Toutesfois si tergiversant d’avantage, il vouloit tousjours nier que son intention ait esté autre que de faire à croire qu’il vit les Ministres dont il parle, en l’Amerique : escoutons encores le langage qu’il tient en un autre endroit.

« Au reste (dit ce Cordelier) Si j’eusse demeuré plus long temps en ce pays là, j’eusse tasché à gagner les ames esgarées de ce povre peuple, plustost que m’estudier à fouiller en terre, pour y cercher les richesses