Page:Jean de Léry - Voyage au Brésil - Gaffarel vol 1, 1880.djvu/74

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requerant l’Eglise et les Ministres dudit lieu de luy ayder et le secourir autant qu’il leur seroit possible en ceste sienne tant saincte entreprinse. Mais sur tout, à fin de poursuyvre et advancer en diligence l’oeuvre qu’il avoit entreprins, et qu’il desiroit, disoit-il, de continuer de toutes ses forces, il prioit instamment, non seulement que on luy envoyast des Ministres de la parole de Dieu : mais aussi pour tant mieux reformer luy et ses gens, et mesme pour attirer les sauvages à la cognoissance de leur salut, que quelques nombres d’autres personnages bien instruits en la Religion Chrestienne accompagnassent lesdits Ministres pour l’aller trouver.

L’Eglise de Geneve ayant receu ses lettres, et ouy ses nouvelles, rendit premierement graces à Dieu de l’amplification du regne de Jesus Christ en pays si lointain, mesme en terre si estrange, et parmi une nation laquelle voirement estoit du tout ignorante le vray Dieu.

Et pour satisfaire à la requeste de Villegagnon, apres que feu Monsieur l’Admiral, auquel pour le mesme effect il avoit aussi escrit, eut sollicité par lettres Philippe de Corguilleray sieur du Pont (qui s’estoit retiré près de Geneve, et qui avoit esté son voisin en France près Chastillon sur Loing) d’entreprendre le voyage pour conduire ceux qui se voudroyent acheminer en ceste terre du Bresil vers Villegagnon : ledit sieur du Pont en estant aussi requis par l’Eglise et par les Ministres de Geneve, quoy qu’il fust jà vieil et caduc, si est-ce que pour la bonne affection qu’il avoit de s’employer à un si bon oeuvre, postposant, et mettant en arriere tous ses autres affaires, mesmes laissant ses enfants et sa famille de si loin, il accorda de faire ce qu’on requeroit de luy.