Page:Jean de Léry - Voyage au Brésil - Gaffarel vol 1, 1880.djvu/76

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Pole Antarctique, ne voulurent point entrer en lice, ni s’enroller et s’embarquer en tel voyage.

Toutesfois apres plusieurs semonces et recerches de tous costez, ceux-cy, ce semble, plus courageux que les autres, se presenterent pour accompagner du Pont, Richier et Chartier : assavoir Pierre Bordon, Matthieu Vernevie, Jean du Bordel, André la Fon, Nicolas Denis, Jean Gardien, Martin David, Nicolas Raviquet, Nicolas Carmeau, Jaques Rousseau, et moy Jean de Lery : qui tant pour la bonne volonté que Dieu m’avoit donnée dès lors de servir à sa gloire, que curieux de voir ce monde nouveau, fus de la partie : tellement que nous fusmes quatorze en nombre, qui pour faire ce voyage partismes de la cité de Geneve le dixiesme de Septembre, en l’année 1556.

Nous tirasmes et allasmes à Chastillon sur Loing, auquel lieu ayans trouvé Monsieur l’Admiral, non seulement il nous encouragea de plus en plus de poursuyvre nostre entreprinse, mais aussi, avec promesse de nous assister pour le faict de la marine, nous mettant beaucoup de raisons en avant, il nous donna esperance que Dieu nous feroit la grace de voir les fruicts de nostre labeur. Nous nous acheminasmes de là à Paris, où durant un mois que nous y sejournasmes, quelques Gentils-hommes et autres estans advertis pourquoy nous faisions ce voyage, s’adjoignirent à nostre compagnie. De là nous passasmes à Rouen, et tirans à Honfleur, port de mer, qui nous estoit assigné au pays de Normandie, y faisans nos preparatifs, et en attendans que nos navires fussent prestes à partir, nous y demeurasmes environ un mois.

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