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Page:Jean de Léry - Voyage au Brésil - Gaffarel vol 1, 1880.djvu/90

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assez semblable au haren, toutesfois un peu plus long et plus rond, a des petits barbillons sous la gorge, les aisles comme celles d’une Chauvesouris et presques aussi longues que tout le corps : et est de fort bon goust et savoureux à manger. Au reste parce que je n’en ay point veu au deçà du Tropique de Cancer, j’ay opinion (sans toutesfois que je le vueille autrement affermer) qu’aimans la chaleur, et se tenans sous la zone Torride, ils n’outrepassent point d’une part ni d’autre du costé des Poles. Il y a encores une autre chose que j’ay observée : c’est que ces pauvres poissons volans, soit qu’ils soyent dans l’eau ou en l’air, ne sont jamais à repos : car estans dans la mer les Albacores et autres grands poissons les poursuivans pour les manger, leur font une continuelle guerre : et si pour eviter cela ils se veulent sauver au vol, il y a certains oiseaux marins qui les prennent et s’en repaissent.

Et pour dire aussi quelque chose de ces oyseaux marins, lesquels vivent ainsi de proye sur mer : ils sont semblablement si privez, que souventesfois il est advenu, que se posans sur les bords, cordages et mats de nos navires, ils s’y laissoyent prendre avec la main, tellement que pour en avoir mangé, et par consequent les ayans veu dedans et dehors, en voici la description. Ils sont de plumage gris comme espreviers : mais combien que quant à l’exterieur, ils paroissent aussi gros que Corneilles, si est-ce toutesfois que quand ils sont plumez, il ne s’y trouve gueres plus de chair qu’en un passereau : de façon que c’est merveille, qu’estans si petits de corps, ils puissent neantmoins prendre et manger des poissons plus grans et plus gros qu’ils ne sont : au reste ils n’ont qu’un boyau, et ont les pieds plats comme ceux des canes.

Retournant donc à parler des autres poissons dont