Page:Jean de Léry - Voyage au Brésil - Gaffarel vol 2, 1880.djvu/112

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Ameriquaines cueillans par les bois un fruict sauvage de la forme d’une citrouille plate, mais beaucoup plus gros, tellement que c’est tant qu’on peut porter d’un en la main, le decoupant par pieces et le faisant tremper dans de l’eau en quelque grand vaisseau de terre, battans puis apres cela avec des bastons de bois elles en font sortir de gros bouillons d’escume : laquelle leur servant de savon elles en font ces licts aussi blancs que neige ou draps de foulon. Au reste, je me rapporte à ceux qui en ont fait l’experience, s’il y fait pas meilleur coucher, principalement en Esté, que sur nos licts communs : et mesme si, c’est sans raison que j’ay dit en l’histoire de Sancerre, qu’en temps de guerre cela est, sans comparaison, plus aisé de pendre en ceste façon des linceuls par les corps de garde pour reposer une partie des soldats qui dorment, pendant que les autres veillent, qu’à l’accoustumée se veautrer par dessus des paillasses, où en salissant les habillemens on ne se remplit pas seulement de vermine, mais aussi quand ce vient à se lever pour faire la faction, on a les costez tous cassez des armes, lesquelles on est contraint d’avoir tousjours à la ceinture, ainsi que nous les avons eues estans assiegez dans ceste ville de Sancerre, où presques sans intervalle l’ennemi un an durant n’a bougé de nos portes.

Or pour faire un sommaire des autres meubles de nos Ameriquains, les femmes (lesquelles entre elles ont toute la charge du mesnage) font force cannes et grands vaisseaux de terre pour faire et tenir le bruvage dit caouin semblablement des pots a mettre cuire, tant de façon ronde qu’ovale : des poesles moyennes et petites, plats et autre vaisselle de terre, laquelle combien qu’elle ne soit guere unie par le