Page:Jean de Léry - Voyage au Brésil - Gaffarel vol 2, 1880.djvu/168

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general prenant son poinct sous ceste ligne, il est certain que quand l’Emisphere des eaux meridionales, à nostre esgard, s’advance en tournant jusques és bornes et limites qui luy sont prescrites, la Septentrionale se reculant d’autant, ceux qui sont au milieu et en la ceinture de la boule estans ainsi comme sur une bassecule, ou hausse qui baisse continuellement, branslez et agitez, sont par ce moyen encor aucunement empeschez de passer outre. A quoy j’adjouste, ce que j’ay jà touché ailleurs : assavoir que l’intemperature de l’air, et les calmes qu’on a souvent sous l’Equateur nuisent beaucoup, et font qu’on est long temps retenu es environs et pres iceluy avant qu’y pouvoir parvenir. Voila sommairement et en passant mon advis sur ceste haute matiere, laquelle au reste j’estime estre tellement disputable, que comme celuy qui a creé ceste grande machine ronde composée d’eau et de terre, et qui miraculeusement la soustient suspendue en l’air, peut luy seul comprendre tout ce qui en est : aussi suis-je asseuré qu’il n’y a homme, tant sçavant soit-il, qui en puisse autrement parler qu’avec correction. Et de fait on pourroit, avec apparence de raison, contredire la pluspart des argumens qui s’en font és escoles, lesquels neantmoins ne sont à mespriser pour resveiller les esprits : moyennant toutesfois que tout cela soit tenu pour seconde cause, et non pas pour supreme comme font les atheistes. Conclusion, je ne croy rien absolument en ce faict, sinon ce que les sainctes Escritures en disent : car pour ce qu’elles sont procedées de l’Esprit de celuy duquel depend toute verité, je tien l’auctorité d’icelles pour seule indubitable.

Poursuyvant donc nostre route, estans ainsi peu à peu avec difficultez approchez de l’Equator, nostre Pilote quelques jours apres ayant prins hauteur à