Page:Jean de Léry - Voyage au Brésil - Gaffarel vol 2, 1880.djvu/169

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

l’Astrolabe, nous asseura que nous estions droit sous ceste Zone et ceinture du monde le mesme jour Equinoctial que le Soleil y estoit, assavoir l’onziesme de Mars : ce qu’il nous dit par singularité, et pour chose advenue à bien peu d’autres navires. Parquoy, sans faire plus long discours là dessus, ayans ainsi en cest endroit le Soleil pour Zenith, et en la ligne directe sur la teste, je laisse à juger à chacun de l’extreme et vehemente chaleur que nous endurions lors. Mais outre cela, quoy qu’en autres saisons le Soleil alternativement tirant d’un costé ou d’autre vers les Tropiques, s’esgaye et s’esloigne de ceste ligne, puis qu’impossible est neantmoins de se trouver en part du monde, soit sur mer ou sur terre où il face plus chaut que sous l’Equator : je suis, par maniere de dire, plus qu’esmerveillé de ce que quelqu’un que j’estime digne de foy, a escrit de certains Espagnols, lesquels, dit-il, passans en une region du Peru, ne furent pas seulement estonnez de voir neiger sous l’Equinoctial, mais aussi avec grande peine et travail traversant sous iceluy des montagnes toutes couvertes de neige : voire y experimenterent un froid si violent, que plusieurs d’entr’eux en furent gelez. Car d’alleguer la commune opinion des Philosophes, assavoir que la neige se fait en la moyenne region de l’air : attendu, di-je, que le Soleil donnant perpetuellement comme à plomb en ceste ligne Equinoctiale, et par consequent, que l’air tousjours chaud ne peut naturellement souffrir, moins congeler de la neige : quelque hauteur des montagnes, ny frigidité de la Lune qu’on me puisse mettre en avant, pour l’esgard de ce climat la (sauf correction des sçavans) je n’y vois point de fondement.

Partant concluant de ma part, que cela est un extraordinaire, et exception en la reigle de Philosophie,