Page:Jean de Léry - Voyage au Brésil - Gaffarel vol 2, 1880.djvu/33

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et savoureux que les meilleures figues de Marseille qui se puissent trouver, il doit estre tenu pour l’un des beaux et bons fruicts de ceste terre du Bresil. Les histoires racontent bien que Caton retournant de Carthage à Rome, y apporta des figues de merveilleuse grosseur : mais parce que les anciens n’ont fait aucune mention de celle dont je parle, il est vray-semblable que ce n’en estoyent pas aussi.

Au surplus les fueilles du Paco-aire sont de figure assez semblables à celles de Lapathum aquaticum : mais au reste estans si excessivement grandes que chacune a communément six pieds de long, et plus de deux de large, je ne croy pas qu’en Europe, Asie, ni Afrique il se trouve de si grandes et si larges fueilles. Car quoy que j’aye ouy asseurer à un apoticaire avoir veu une fueille de Petasites qui avoit une aulne et un quart de large, c’est à dire (ce simple estant rond) trois aulnes et trois quarts de circunference, encores n’est-ce pas approcher de celle de nostre Paco-aire. Il est vray que n’estans pas espesses à la proportion de leur grandeur, ains au contraire fort minces, et toutesfois se levans tousjours toutes droites : quand le vent est un peu impetueux (comme ce pays d’Amerique y est fort sujet) n’y ayant que la tige du milieu de la fueille qui puisse resister, tout le reste à l’entour se descoupe de telle façon, que les voyans un peu de loin vous jugeriez de prime face que ce sont grandes plumes d’Austruches, dequoy les arbrisseaux sont revestus.

Quant aux arbres portans le cotton, lesquels croissent en moyenne hauteur, il s’en trouve beaucoup en ceste terre du Bresil : la fleur vient en petites clochettes jaunes comme celles des courges ou citrouilles de par-deçà : mais quand le fruict est formé il a non seulement la figure approchante de la feinte des costeaux