Page:Jean de Rotrou-Oeuvres Vol.4-1820.djvu/78

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée


Scène V

Créon, Éphise, Cléodamas
Hémon, ensuite


Ephise

Sire, à peser bien tout d'une égale balance,

Ce procédé n'est pas sans quelque violence : [1315]

L'honneur qu'on rend aux morts est une vieille loi ;

Par naissance et par droit Polynice fut roi ;

Antigone est sa sœur, elle est votre parente ;

Vous en privez Hémon, Ismène est innocente ;

L'autre est veuve d'un mort. Que votre jugement [1320]

Sur toutes ces raisons passent un peu mûrement.

Créon

De toutes ces raisons pour une déloyale,

Pas une ne détruit la puissance royale ;

Être trop indulgent laisse aussi trop oser.

Des autres mon conseil m'en fera disposer. [1325]


À Hémon qui entre.


Ne dissimulez point la douleur qui vous presse ;

Elle est juste en l'amant qui perd une maîtresse :

Mais d'autre part, Hémon, elle est injuste aussi

En un fils qui, bien né, de son père a souci,

Et qui, sage, épousant son amour et sa haine, [1330]

Se fait de ses désirs une loi souveraine.

Hémon

Ayant l'honneur que j'ai d'être sorti de vous,

Votre intérêt, Monsieur, sur tout autre m'est doux.

J'ai tous les sentiments que mon devoir m'ordonne ;

Je tiens de votre sang et de votre couronne, [1335]