Page:Jean de Rotrou-Oeuvres Vol.5-1820.djvu/253

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Oui, de ce coup, Seigneur, un frère fut capable,

Ce fer porte le chiffre, et le nom du coupable [1410]

Vous apprend de quel bras il fut l'exécuteur,

Et complice du meurtre en déclare l'auteur ;

Ce fer, qui chaud encore, par un énorme crime,

A traversé d'amour la plus noble victime ;

L'ouvrage le plus pur que vous ayez formé, [1415]

Et le plus digne coeur dont vous fussiez aimé ;

Ce coeur, enfin, ce sang, ce fils, cette victime,

Demandent par ma bouche un arrêt légitime ;

Roi, vous vous feriez tort, par cette impunité,

Et père de votre fils, vous devez l'équité ; [1420]

J'attends de voir pousser votre main vengeresse,

Ou par votre justice, ou par votre tendresse ;

Ou, si je n'obtiens rien de la part des humains,

La justice du ciel me prêtera les mains ;

Ce forfait contre lui cherche en vain du refuge, [1425]

Il en fut le témoin, il en sera le juge ;

Et pour punir un bras d'un tel crime noirci ;

Le sien saura s'étendre, et n'est pas raccourci ;

Si vous lui remettez à venger nos offenses.

LE ROI

Contre ces charges, Prince, avez-vous des défenses ? [1430]

LE PRINCE

Non, je suis criminel, abandonnez grand Roi

Cette mourante vie aux rigueurs de la loi ;

Que rien ne vous oblige à m'être moins sévère,

Supprimons les doux noms et de fils et de père,

Et tout ce qui pour moi vous peut solliciter, [1435]

Cassandre veut ma mort, il l'a faut contenter ;

Sa haine me l'ordonne, il faut que je me taise ;