Page:Jean de Rotrou-Oeuvres Vol.5-1820.djvu/410

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Le sceptre que sujet, j'ai hésité de prendre ; [1510]

Et Roi, j'ai reconnu, que la possession,

Qui refroidit l'amour, accroît l'ambition ;

Vous avez eu plus d'heur, comme plus de naissance,

Et nous sommes tombés, dessous votre puissance ;

Mais, encor étourdi, de ce grand accident, [1515]

Je garde, toutefois, un coeur indépendant,

Et pour me conserver, le bien de la lumière,

À votre vanité, plaindrais une prière.

Syroës

Hé bien Prince, la mort, domptera cet orgueil !

Mardesane

On ne peut mieux tomber, du trône, qu'au cercueil ; [1520]

L'ardeur de commander,trop puissamment convie,

Pour me la faire perdre, en me laissant la vie ;

Un coeur né pour régner, est capable de tout,

Je n'excepterais rien, pour en venir à bout ;

Pour accomplir en moi, les desseins de ma mère, [1525]

Pour venger ma prison, et celle de mon père ;

Je vous ai respecté, dépouillé de vos droits,

Je consentais à peine, à vous donner des lois :

Et peut-être, eussé-je eu, la naissance assez bonne,

Pour venir à vos pieds remettre ma couronne ; [1530]

Mais après le parti, que l'on nous a formé,

Et le sanglant complot, que vous avez tramé,

Au splendide mépris, des droits, de la nature,

Je ne vous cèle point, que si quelque aventure,

Remettait aujourd'hui, le sceptre entre mes mains ; [1535]

Pour vous le rendre plus, tous respects seraient vains ;

Et dépouillant pour vous, tous sentiments de frère,

Je me ferais justice, et vengerais mon père ;