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Page:Jeanne Landre-Echalote et ses amants 1909.djvu/48

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échalote et ses amants

d’eau, les porte-manteaux et les becs d’éclairage. Tout Montmartre connaissait cette cuisine où les cuvettes et les ustensiles d’argent voisinaient avec les boîtes de poudre, les fers à friser, les polissoirs et les carmins destinés à replâtrer et à retaper les beautés endommagées par les exercices sudorifiques et amoureux. Le bureau était quelconque mais avec un divan. La chambre, capitonnée et mystérieuse, était meublée d’armoires et de chaises claires, de terres cuites et de toiles académiques et d’un lit bas et immense au-dessus duquel se balançaient, sur une pancarte blanc d’ivoire, ces mots fascinateurs : L’essayer, c’est l’adopter. Dans le vestibule, en face de la porte d’entrée, on lisait cette autre inscription sur émail vert pomme : La maison ne fait pas de crédit.

À ces deux enseignes il convenait d’ajouter la devise personnelle du maître de céans. Elle s’étalait en écusson sur quelques verres gravés à la foire et, au-dessous de son effigie dorsale, sur son papier à lettre : Petits moyens, mais bon genre.

Ainsi étiqueté, M. Plusch était peut-être ce qu’il y avait de plus original dans Montmartre. Aussi le recherchait-on dans les jours de spleen et tenait-on à sa compagnie dès qu’un ennui vous embrumait les idées et vous montrait la vie en noir. En admettant qu’il fût lui-même dans un de ces moments où l’on renâcle à créer les péripéties et à faire naître les amusements, il avait assez de souvenirs pour vous dérider l’esprit et assez d’aventures dans son sac pour développer votre horizon. C’est alors qu’il se

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