Page:Jerome - Œuvres complètes, trad. Bareille, tome 8, 1879.djvu/520

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votre profession ? de quel pays et de chez quel peuple êtes-vous parti ? où allez-vous ? Il faut remarquer cette rapidité du discours, que nous admirons dans Virgile : « Jeunes gens, quel motif vous a poussés à entreprendre un voyage inconnu ? Où allez-vous ? dit-il. Votre race votre patrie ? En apportez-vous la paix ou la guerre ? Eneid. 5, 1. seqq. L’interrogatoire porte sur sa personne, son pays, le but de son voyage, sa ville natale, afin que de là sorte aussi la cause de leur calamité.

« Il leur répondit : Je suis Hébreu, et je crains le Seigneur Dieu du ciel qui a fait la mer et les continents. » Jon. 1, 9. Les Septante : « Il leur répondit : Je sais le Seigneur, et j’adore le Dieu du ciel, qui a fait la mer et les continents. » Il ne dit pas : Je suis Juif, le schisme des dix tribus ayant fait donner, ce nom au peuple à cause des deux autres ; il dit : Je suis Hébreu, c’est-à-dire passant, comme Abraham, — qui pouvait à bon droit s’exprimer ainsi : « Je suis étranger et voyageur comme tous mes, pères ; » Psa. 38, 12 ; et dans le psaume : « Ils sont passés d’une nation à l’autre, et d’un royaume à un autre peuple ; » et Moïse : « Je passerai et je verrai cette grande vision. » Exo. 3, 3. Je crains le Seigneur Dieu du ciel ; non les dieux que vous invoquez et qui ne peuvent sauver, mais le Dieu du ciel, qui a fait la mer et les continents ; la mer sur laquelle je fuis, et le continent que je fuis. Le texte oppose élégamment au nom de mer celui de continent, et non celui de terre ; et un trait suffit à nous montrer le Créateur de toutes choses dans celui qui est le Seigneur du ciel et de la terre et de la mer. On se demande comment il peut dire avec vérité : « Je crains le Seigneur Dieu du ciel », quand il ne fait pas ce qu’il ordonne. On peut répondre, puisque les pécheurs eux-mêmes craignent Dieu, le propre des serviteurs est, non d’aimer, mais de craindre. Ici toutefois crainte peut s’entendre pour culte, selon le sens de ceux qui entendaient Dieu, qu’ils ignoraient encore.

« Alors ils furent saisis d’une grande crainte, et ils lui dirent : Pourquoi avez-vous fait cela ? car ils avaient su de lui-même qu’il fuyait de devant la face du Seigneur. » Jon. 1, 10. Les Septante : « Les mariniers furent saisis d’une grande crainte, et ils lui dirent : « pourquoi avez-vous fait cela ? car ils avaient su qu’il fuyait de devant la face du Seigneur, parce qu’il le leur avait indiqué lui-même. » L’ordre chronologique est interverti. Comme on pourrait objecter qu’ils n’avaient aucun sujet de crainte de cet aveu qu’il leur avait fait : « Je suis hébreu, et je crains le Seigneur Dieu du ciel, qui a fait la mer et les continents », le texte ajoute aussitôt qu’ils furent saisis de crainte, parce qu’il leur avait indiqué qu’il fuyait la présence du Seigneur et qu’il n’obéissait pas à son ordre. De là leur accusation : « pourquoi avez-vous