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Page:Jerome - Œuvres complètes, trad. Bareille, tome 9, 1881.djvu/234

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yeux qu’aux oreilles d’en juger ; à nous surtout qui sommes à présent dans cette province, il est facile de voir, facile de contrôler la preuve de ce qui est écrit. C’est à peine si l’œil peut découvrir quelques vestiges de ruines à la place des grandes villes d’autrefois. À Silo, où furent le tabernacle et l’Arche d’alliance du Seigneur, à peine montre-t-on les fondements de l’autel. Gabaa, la cité de Saul, a été détruite jusqu’en ses fondements. Jug. 20, 20. De Rama et de Béthoron et des autres villes célèbres construites par Salomon, il ne reste que de pauvres villages. Lisons Josèphe en même temps que la prophétie de Sophonie, et dans celle-ci nous trouverons l’histoire qu’a écrite celui-là. Et cela n’est pas à dire seulement de la captivité : aujourd’hui même, ces colons perfides, qui ont mis à mort les serviteurs de Dieu et enfin son Fils même, réduits aux sanglots, se voient interdire l’entrée de Jérusalem, et pour qu’il leur soit permis de pleurer la ruine de leur cité, ils achètent cette entrée à prix d’or, en sorte que, autrefois, ceux qui avaient acheté le sang de Jésus-Christ achètent leurs larmes, et il n’y a pas jusqu’aux pleurs qui soient gratuites pour eux. On vit, le jour où Jérusalem fut prise et détruite par les Romains, venir ce peuple à l’extérieur lugubre, s’écouler le cortège des femmes décrépites, et les vieillards, chargés de haillons et d’années, offrir dans leurs corps et leur attitude la vivante image des effets de la colère du Seigneur. On rassemble cette foule de malheureux, et pendant que le gibet du Seigneur resplendit des rayons de sa résurrection, et que du mont des Oliviers brille l’étendard de la croix, voilà ce peuple malheureux, sans pouvoir pourtant émouvoir la pitié, qui pleure sur les ruines de son temple ; les larmes arrosent encore ses joues, les bras sont livides, les cheveux épars, et le soldat exige une contribution, moyennant laquelle il leur est permis de pleurer davantage ; et l’on pourrait, devant ce spectacle, avoir un doute au sujet du jour de l’affliction et du serrement de cœur, du jour de calamité et de misère, du jour de ténèbres et d’obscurité, du jour de nuages et de tempêtes, du jour du retentissement delà trompette ? Car à leur deuil aussi se mêle le retentissement des trompettes, et, conformément à la prophétie, la voix des solennités s’est changée en gémissements. Ils poussent des hurlements sur les cendres du sanctuaire et sur l’autel détruit, sur les villes fortes autrefois et sur les hautes tours du temple, du haut desquelles ils précipitèrent autrefois Jacob, frère du Seigneur. Voilà ce qui est dit au sujet de la captivité des Juifs.

D’autre part si, comme précédemment, nous rapportons le jour du Seigneur à la consommation du monde ou à la sortie de la vie pour chacun de nous, il en résultera cette interprétation évidente, que la voix du jour du Seigneur est amère, pleine de maux inévitables et de colère, où les plus puissants seront accablés d’affliction, alors que ceux qui sont saints seront sauvés sans doute, mais seulement comme en passant par le feu. Ce jour sera un jour de tribulation, d’angoisses, de calamité et de misère,