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Et d’une main de fer son trait enflammé darde.
- Car tost apres Cesar jure contre ma teste,
- Et mon piteux exil de ce monde m’appreste. (60)
- Me voila ja croyant ma Roine, ains ma ruine,
- Me voila bataillant en la plaine marine,
- Lors que plus fort j’estois sur la solide terre,
- Me voila ja fuyant oublieux de la guerre,
- Pour suivre Cleopatre, en faisant l’heur des armes (65)
- Ceder à ce malheur des amoureux alarmes.
- Me voila dans sa ville ou j’yvrongne et putace,
- Me paissant des plaisirs, pendant que Cesar trace
- Son chemin devers nous, pendant qu’il a l’armee
- Que sus terre j’avois, d’une gueule affamee, (70)
- Ainsi que le Lyon vagabond à la queste,
- Me voulant devorer, et pendant qu’il s’appreste
- Son camp devant la ville, où bientost il refuse
- De me faire un parti, tant que malheureux j’use
- Du malheureux remede, et poussant mon espee (75)
- Au travers des boyaux en mon sang l’ay trempee,
- Me donnant guarison par l’outrageuse playe.
- Mais avant que mourir, avant que du tout j’aye
- Sangloté mes esprits, las, las ! quel si dur homme
- Eust peu voir sans pleurer un tel honneur de Romme, (80)
- Un tel dominateur, un Empereur Antoine,
- Que ja frappé à mort sa miserable Roine,
- De deux femmes aidee, angoisseusement palle
- Tiroit par la fenestre en sa chambre royale !
- Cesar mesme n’eust peu regarder Cleopatre (85)
- Couper sur moi son poil, se deschirer et battre,
- Et moi la consoler avecques ma parole,
- Ma pauvre ame soufflant qui tout soudain s’en vole,
- Pour aux sombres enfers endurer plus de rage
- Que celui qui a soif au milieu du breuvage, (90)
- Ou que celuy qui roüe une peine eternelle,
- Ou que les palles Sœurs, dont la dextre cruelle
- Egorgea les maris, ou que celuy qui vire
- Sa pierre, sans porter son faix où il aspire.
- Encore en mon tourment tout seul je ne puis estre : (95)
- Avant