Page:Jodelle - Les Œuvres et Meslanges poétiques, t. 1, éd. Marty-Laveaux, 1868.djvu/173

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PROCULEE.
Mais pourroit-elle à Romme estre traisnee,
Veu qu’elle n’a sans fin autre desir
Que par sa mort sa liberté choisir ?
Sçavez-vous pas, lors que nous echellasme
Et que par ruse en sa court nous allasmes ?
Que tout soudain qu’en la court on me veit,
En s’écriant une des femmes dit :
"O pauvre Roine ! es-tu donc prise vive ?
Vis tu encor pour trespasser captive ? "
Et qu’elle ainsi, sous telle voix ravie,
Vouloit trancher le fil de sa vie,
Du cimeterre à son costé pendu,
Si saisissant je n’eusse deffendu
Son estomach ja desja menassé
Du bras meurdrier à l’encontre haussé ?
Sçavez-vous pas que depuis ce jour mesme
Elle est tombee en maladie extreme,
Et qu’elle a feint de ne pouvoir manger,
Pour par la faim à la fin se renger ?
Pensez-vous pas qu’outre telle finesse
Elle ne trouve à la mort quelque addresse ?

AGRIPPE.
Il vaudroit mieux dessus elle veiller,
Sonder, courir, espier, travailler,
Que du berger la veue gardienne
Ne s’arrestoit sus son Inachienne.
Que nous nuira, si nous la confortons,
Si doucement sa foiblesse portons ?
Par tels moyens s’envolera l’envie
De faire change à sa mort de sa vie :
Ainsi sa vie heureusement traitee
Ne pourra voir sa quenouille arrestee :
Ainsi, ainsi jusqu’à Romme elle ira ;
Ains