Page:Jodelle - Les Œuvres et Meslanges poétiques, t. 1, éd. Marty-Laveaux, 1868.djvu/175

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mes yeux
Digne le pleur ? Celuy dont s’effemine
Qui ja du tout l’effeminé ruine ?
Non, non, les plains cederont aux rigueurs,
Baignons en sang les armes et les cœurs,
Et souhaitons à l’ennemi cent vies,
Qui luy seroient plus durement ravies ;
Quant à la Roine, appaiser la faudra
Si doucement que sa main se tiendra
De forbannir l’ame seditieuse
Outre les eaux de la rive oublieuse.
Je vois desor en cela m’efforcer,
Et son desir de mort effacer :
Souvent l’effort est forcé par la ruse.
Pendant, Agrippe, aux affaires t’amuse,
Et toy, loyal messager Proculee,
Sonde partout ce que la fame aislee
Fait s’acouster dedans Alexandrie
Qu’elle circuit, et tantost bruit et crie,
Tantost plus bas marmote son murmure,
N’estant jamais loin de telle aventure.

PROCULEE.
Si bien par tout mon devoir se fera
Que mon Cesar de moy se vantera.
O ! S’il me faut ores un peu dresser
L’esprit plus haut et seul en moy penser,
Cent et cent fois miserable est celuy
Qui en ce monde a mis aucun appuy :
Et tant s’en faut qu’il ne fasche de vivre
A ceux qu’on voit par fortune poursuivre,
Que moy, qui suis du sort assez contant,
Je suis fasché de me voir vivre tant.
Où es tu, Mort, si la prosperité
N’est sous les cieux qu’une infelicité ?
Voyons les grands, et ceux qui de leur teste
Semblent desja deffier la tempeste :
Quel heur ont ils pour une fresle