dans lesquelles les fourmis s’enferment pour opérer leur métamorphose et prendre des ailes, à la manière de beaucoup d’autres insectes ?
moi. — Je sais que plusieurs naturalistes sont de cet avis ; je n’oserais cependant soutenir qu’ils ont raison. Si les fourmis d’Europe méritent tant d’attention, celles des pays très-chauds de l’Amérique font des travaux bien plus merveilleux encore : il y en a qui se bâtissent de véritables palais de six à huit pieds de hauteur sur autant de largeur, entourés de murs solides, épais, impénétrables à la pluie, avec voûtes, cascades, colonnades, galeries couvertes à l’intérieur ; et cette masse, vidée et nettoyée, sert de four aux naturels de ces contrées. En général, les fourmis sont des animaux nuisibles, vivant de vol et de rapine ; il y a cependant en Amérique une espèce fort utile de ces fourmis appelées fourmis céphalotes ou fourmis de visite qui arrivent en troupes nombreuses tous les trois ans. Elles se répandent dans les maisons et détruisent rats, souris, punaises, et d’autres insectes très-incommodes ; si, au contraire, elles sont forcées, pour une cause quelconque, de se réfugier dans les campagnes, elles occasionnent de grands dégâts, puisqu’elles peuvent, en une seule nuit, dépouiller les arbres de leurs feuilles, qu’elles emmagasinent dans des caves de sept à huit pieds de profondeur, creusées par elles au pied de ces mêmes arbres. À en croire certains voyageurs, plusieurs îles des mers du Sud sont tellement infestées de fourmis, qu’on n’ose plus y aborder. On leur en a laissé une en pleine souveraineté : l’île aux Fourmis.
fritz. — Ne connaît-on pas de moyens assez puissants pour les détruire et arrêter leurs ravages ?
moi. — Les plus sûrs sont l’eau bouillante et le feu. La nature leur a d’ailleurs opposé des ennemis redoutables : le myrmécophage[1] ou fourmilier, quadrupède qui introduit sa
- ↑ De deux mots grecs qui signifient mangeur de fourmis.