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le robinson suisse.

ficelle, tout ce qu’elles purent contenir enfin, et nous attendîmes patiemment le retour du jour, espérant, en cas que le navire achevât de se briser pendant la nuit, arriver à terre moitié en nageant, moitié poussés par la vague.

Je dis à Fritz, qui était accablé de fatigue, de dormir ; ma femme et moi nous veillâmes. Cette nuit fut pour nous la plus horrible des nuits. Que d’alarmes, de craintes, de terreurs à chaque bruit des flots, sur le bâtiment à demi brisé ! mais aussi que de ferventes prières adressées à Dieu avec la plus entière confiance ! Le matin nous montra un ciel pur, un soleil brillant ; plus de vent furieux, une mer calme et unie. Réjoui par cette vue, j’appelai ma femme et mes enfants sur le pont, où je m’étais rendu le premier. Mes fils furent fort surpris de ne plus voir un seul matelot. « Où sont nos gens ? me demandèrent-ils. Sans eux, comment continuer notre voyage ?

— Chers enfants, leur répliquai-je, ceux en qui nous avions tant de confiance nous ont trahis ; mais, si nous espérons fermement en Dieu, il ne nous abandonnera pas au milieu du danger. Maintenant, à l’œuvre ! point de temps à perdre ! Voyons comment nous quitterons la carcasse du navire, et comment nous gagnerons la terre, qui n’est pas loin de nous.

— Jetons-nous à l’eau, dit Fritz, et nageons pendant que la mer est calme. Je me charge de conduire ma mère ; vous pousserez mes deux frères, et Ernest est assez fort pour nous suivre à l’aide de ces deux barils. »

Ernest, un peu lourd de son naturel, n’accepta pas cette proposition, et dit qu’il valait mieux construire un radeau sur lequel on se sauverait tous ensemble.

« Je serais de ton avis, dis-je à Ernest ; mais construire un radeau est chose longue et difficile ; et puis, comment le diriger ? Visitons d’abord l’intérieur du navire ; que chacun de nous songe à se munir des objets qui nous doivent être de la plus grande utilité. » Aussitôt ils parcoururent le bâti-