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Page:John Ruskin par Frédéric Harrison.djvu/291

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cumuler des faits visibles ». C’est là vraiment une sorte de vivisection. Il en est de même de cet aveu que Don Quichotte qui, enfant, le faisait rire aux larmes, est maintenant devenu pour lui « l’un des livres les plus tristes et les plus choquants ». Hélas ! John Ruskin ressemblait un peu au chevalier de La Manche, comme lui il devait apprendre que tout le dévouement d’un chevalier errant, tout le romanesque du Moyen Age, malgré toute leur beauté poétique, ne peuvent, ici-bas et dans notre siècle, avec une tance rouillée et un coursier fourbu, réformer le monde. C’est superbe ; c’est peut-être une noble guerre ; mais il n’y a point là une philosophie sociale qu’on puisse appliquer, ni une religion qu’on puisse pratiquer.

Il paraît bien le comprendre un peu lui-même, du moins, il le laisse pressentir, quand il se lamente sur les erreurs de sa première éducation, son isolement, l’éloignement pour lui de tout risque, de toute fatigue, de tout souci, de tout camarade au point que les garçons le prenaient pour un naïf et le traitaient comme une fille ; « un monde de présomptions était en lui et le rendait indifférent aux moqueries ». Si seulement ses parents, dit-il, avaient consenti à lui donner quelque espèce de poney gallois bien hirsute et à le confier à quelque guide du pays et à sa femme au lieu de le couver à la maison « ils auraient pu ainsi faire de