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Page:Joly - Note sur l'enseignement agricole en France et à l'étranger.djvu/18

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n’est qu’un théâtre de polichinelles, un gargantua qui, en quinze ans, a consommé trente ou quarante ministres de l’agriculture ? Que peut faire un homme qui a à peine le temps d’endosser son costume officiel et de connaître ses chefs de service ? Ne mourons-nous pas de cette abominable maladie que nos docteurs n’ont pu définir et qu’on appelle « la politique » ? Ah ! méditons bien ces paroles que prononçait notre illustre Pasteur dans son discours de réception de M. Bertrand, à l’Académie française, le 14 décembre dernier : « La vraie démocratie est celle qui permet à chaque individu de donner son maximum d’efforts dans le monde ! Pourquoi faut-il qu’à côté de cette démocratie féconde il en soit une autre stérile et dangereuse qui, sous je ne sais quel prétexte d’égalité chimérique, rêve d’absorber et d’anéantir l’individu dans l’État ? Cette fausse démocratie a le goût, j’oserais dire, le culte de la médiocrité : Tout ce qui est supérieur lui est suspect. On pourrait la définir : la ligue de ceux qui veulent vivre sans travailler, consommer sans produire, arriver aux emplois sans y être préparés et aux honneurs sans être dignes. »

Une autre maladie, chez nous, consiste à forcer, de par la loi, les départements et les communes à fonder non des écoles d’agriculture dont nous avons tant besoin, mais des écoles normales d’institutrices, en grévant pour cela les budgets des communes, au point de ne plus pouvoir satisfaire les besoins les plus indispensables. On a vu des séances du Sénat, par exemple, celle du 29 décembre dernier, occupée à voter 40 ou 42 emprunts pour fonder des écoles dites normales, là où les besoins d’instruction étaient largement satisfaits. Si l’on faisait le relevé des emprunts faits par les villes et les départements, sans nécessité absolue, on en serait effrayé. Je n’ose pas dire les chiffres que j’ai déjà constatés ; mais, qu’on me permette une simple question ; y a-t-il correspondance entre l’accroissement de l’instruction et l’accroissement de la moralité publique ? Ne confond-on pas l’instruction avec l’éducation ? Ne développe-t-on pas l’une aux dépens de l’autre ? Enfin, et je termine ce triste sujet, ne constate-t-on pas une criminalité croissante dans la jeunesse et ne voit-on pas commettre aujourd’hui, par des enfants, des crimes