Page:Jorga - Histoire des roumains et de leur civilisation, 1920.djvu/237

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fils et défenseurs. La milice impériale n’intervint que bien tard pour mettre fin à l’anarchie. Trahi par leurs compatriotes, les chefs du mouvement furent pris dans leur refuge ; l’un d’entre eux se suicida en prison, les deux autres, dont Horea, subirent le supplice affreux de la roue, à la place même où, trois cents ans auparavant, un prince de leur race entrait en triomphateur, après avoir défait les défenseurs magyars et saxons de la Transylvanie (1784-1785).

Mais déjà les efforts des Roumains de cette province pour arriver à une vie nationale avaient pris une autre voie, qui était sans doute meilleure. Il ne s’agissait plus de s’assurer un appui dans l’administration autrichienne, de vaincre l’obstination des ennemis séculaires, de terroriser les représentants d’un passé qui ne voulait pas encore capituler devant la nouvelle nécessité des choses. Il ne s’agissait pas même de poser comme but de la lutte ; qui devait être aussi longue par ses fatigues et ses souffrances que féconde dans ses derniers résultats, la reconnaissance des Roumains comme nation constitutionnelle dans la province qu’ils partageaient avec les Magyars, les Saxons et les Sze-kler. On s’aperçut enfin qu’il fallait avant tout donner à un peuple résolu à secouer enfin de si anciennes et si fortes entraves cette arme invincible : la conscience fière et aggressive de son droit et de ses traditions.

Déjà l’évêque martyr avait parlé de l’origine romaine, de l’ancêtre Trajan, de la noblesse de sa race et de sa persistance ininterrompue sur la terre de son héritage. L’inspiration lui en était venue des études classiques qu’il avait faites dans les collèges de Jésuites ; mais les chroniques moldaves et valaques, qui donnaient un sens actuel à ces notions scolastiques et littéraires, avaient trouvé leur chemin jusque dans les cellules des jeunes moines qui se formaient dans les écoles fondées par Micu et surtout par son successeur