Page:Jorga - Histoire des roumains et de leur civilisation, 1920.djvu/245

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dans la naïveté et l’énergie d’un langage dont le style touffu ne permet pas toujours de reconnaître aujourd’hui la verve prophétique. Déjà avant lui, Georges Asachi, fils d’un prêtre étranger venu de Galicie et d’une Roumaine, avait fondé, après des années passées dans les écoles de Vienne et dans les milieux poétiques et artistiques de l’Italie, un enseignement des sciences exactes en roumain, à Jassy ; il avait gagné l’approbation chaleureuse du Métropolite Benjamin et de ce boïar éclairé, capable encore des plus belles actions au profit de son peuple, qui devait être plus tard l’égoïste prince Michel Sturdza. L’école d’ingénieurs d’Asachi, nécessaire pour les délimitations dont l’ère était venue par la promulgation des nouveaux codes, eut des disciples zélés, mais elle ne provoqua pas dans la Capitale moldave l’enthousiasme général qui accueillit à Bucarest, dès les premières leçons, l’œuvre scolaire de Georges Lazar, bornée cependant par le contrat avec les éphores des écoles aux seules mathématiques élémentaires. L’Académie grecque vit partir bon nombre de ses élèves, qui préféraient écouter dans les pauvres cellules abandonnées du couvent de Saint-Sabbas cette prédication populaire, grave et solennelle, lourde de souffrances et cependant animée par l’essor invincible des espérances les plus légitimes. Le nouvel esprit s’était formé, et il devait dominer et féconder toute une école. Ce qui se passa désormais dans l’ordre politique et social — et ceci s’applique à la Transylvanie elle-même qui en ressentit bientôt le contre-coup, aussi bien qu’aux Principautés, — ne fut qu’un concours bien venu ou qu’une résistance dont l’opiniâtreté ne pouvait constituer jamais un empêchement durable. Cet esprit fut le fait essentiel, le grand facteur de changements, la source de toute consolation pour les maux inévitables et de tous les espoirs pendant un siècle entier.