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DE LAGRANGE AVEC D’ALEMBERT

charmé d’avoir été comme l’occasion de vos profondes recherches sur cette matière. M. Fontaine[1] n’avait fait que l’effleurer, et il doit vous savoir gré d’avoir fait valoir sa méthode, que j’avais toujours regardée comme plus ingénieuse qu’utile. M. Euler avait entrepris la même chose, mais il n’a pas été aussi heureux que vous, comme vous pouvez le voir par le Mémoire qu’il a donné sur ce sujet dans le Tome X de Pétersbourg[2].

M. de Catt m’a montré un article d’une de vos Lettres concernant l’affaire de M. l’abbé Bossut[3]. Il est certain qu’elle dépend uniquement du roi et qu’ainsi vous êtes plus en état que personne de la faire réussir. Pour moi, je ne puis que vous remercier de la déférence que vous avez bien voulu me marquer, et vous assurer que je m’estimerai toujours très-heureux de pouvoir vous donner des preuves de la mienne. Je souhaiterais seulement, par rapport à l’affaire dont il s’agit, que cela n’ouvrît point la porte de l’Académie à tant d’autres personnes qui y aspirent depuis longtemps, et je ne vous dissimulerai pas que je me suis opposé de toutes mes forces à la démarche que quelques-uns de mes confrères voulaient faire, il y a quelques mois, auprès du roi, pour l’engager à nommer quelques nouveaux membres étrangers, car, comme le nombre en est encore fort grand, si on continue à l’augmenter, il deviendra de plus en plus impossible de le fixer, comme nous l’avions projeté.

Vous faites très-bien de ménager votre vue autant qu’il vous est possible. On dit que M. Euler a perdu ou va perdre la sienne : ce serait

  1. Alexis Fontaine des Bertins, géomètre, membre de l’Académie des Sciences, né à Claveyson (Drôme) en 1705, mort à Cuiseaux (Saône-et-Loire) le 21 août 1771. — Dans le Recueil de ses Mémoires donné à l’Académie royale des Sciences, non imprimés dans leur temps, Paris, 1764, in-4o, se trouve à la page 15 un Mémoire Sur les courbes tautochrones, qui commence ainsi « Lorsque j’entrai à l’Académie, l’Ouvrage que M. Jean Bernoulli lui avait envoyé en 1730, qui est un chef-d’œuvre, venait de paraître. Cet Ouvrage avait tourné l’esprit de tous les géomètres de ce côté-là ; on ne parlait que du problème des tautochrones. J’en donnai la solution que voici, et on n’en parla plus. »
  2. Le Tome X des Commentarii Academiæ Scientiarum imperialis petropolitanæ, qui se rapporte à l’année 1738 et ne parut qu’en contient sept Mémoires d’Euler.
  3. Charles Bossut, géomètre, membre de l’Académie des Sciences (1768), puis de l’Institut, né le 11 août 1730 à Tarare, mort le 14 janvier 1814.