Page:Joseph Louis de Lagrange - Œuvres, Tome 13.djvu/144

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vouloir la grossir davantage, parce que ce ne pourrait être qu’aux dépens des deux suivantes. Ainsi, je réserverai vos Mémoires pour le Volume de 1768, qui sera mis sous presse à Pâques prochain, à moins que vous n’aimiez mieux les insérer dans le Volume de 1763 qu’on mettra sous presse à la Saint-Michel de cette année-ci ; mais, comme je n’étais pas encore ici en 1763, ce serait, ce me semble, un anachronisinne trop grand de rapporter à cette année des Mémoires qui me sont adressés en forme de Lettres ; du reste, je ferai là-dessus ce que vous voudrez.

Vos remarques sur la théorie des cordes vibrantes de M. Bernoulli me paraissent décisives. J’admire la constance avec laquelle vous êtes capable de poursuivre un même objet pendant un si long temps ; pour moi j’ai ce malheur que, à force de remanier la même matière, j’en prends à la fin un si furieux dégoût, qu’il m’est comme impossible d’y revenir encore, et c’est précisément ce qui m’est arrivé à l’égard des cordes vibrantes ; voilà pourquoi j’ai toujours négligé de répondre à M. Daniel Bernoulli, quoique je pusse le faire avec avantage. Je suis charmé que vous ayez reconnu que ma solution de l’équation de Riccati[1] revient au même que celle de M. Euler, ce qui peut servir à confirmer la bonté de ma méthode ; au reste, j’ai peine à croire que l’intégrale que donne ma méthode ne soit pas complète et générale, comme vous paraissez l’insinuer c’est un point que je me propose d’examiner à loisir. Les restrictions que vous ajoutez à ma solution générale du problème des tautochrones sont très-légitimes. Lorsque je lus à l’Académie l’appendice qui contient cette solution, j’avais dessein de l’étendre et de la perfectionner dans un Mémoire particulier ; mais, ayant vu ensuite que vous m’aviez déjà prévenu sur ce sujet, j’ai cru devoir l’abandonner entièrement, d’autant plus qu’il me semble que vous l’avez déjà presque épuisé.

Je vais maintenant, si vous me le permettez, m’entretenir un peu avec vous sur quelques points relatifs à votre cinquième Volume

  1. Le comte Jacopo Riccati, mathématicien, né en 1676 à Venise, mort à Trévise en 1754. (Voir, au sujet de cette équation, Montucla, part. V, liv. I, t. III, p. 135.)