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86.

LAGRANGE À D’ALEMBERT.

À Berlin, ce 20 décembre 1770.

Mon cher et illustre ami, j’ai reçu la Lettre que vous me fîtes l’honneur de m’écrire la veille de votre départ. Ma réponse l’aurait suivie de plus près si j’avais su comment vous la faire parvenir. On m’avait mandé de Turin que l’on vous attendait à tout moment, et j’étais déjà sur le point de vous écrire en Italie lorsque j’appris que vous aviez renoncé au voyage de ce pays-là et que vous vous borniez à courir par les provinces de France. J’ignore par quelle raison vous avez changé d’avis. Peut-être que nos montagnes couvertes de neige et bordées de précipices vous ont rebuté ; mais vous auriez trouvé par delà un pays charmant, où l’on vous attendait à bras ouverts et où l’on n’aurait rien négligé pour vous recevoir d’une manière conforme à votre mérite ; je ne désespère pas que la chose ne puisse avoir lieu une autre fois. Je vous conseillerais seulement de choisir le printemps plutôt que l’hiver pour un tel voyage, au risque même de ne pas voir quelques-uns de nos opéras, ce qui au fond n’est pas d’une grande importance.

Je vous remercie de tout mon cœur des pièces que vous avez bien voulu m’envoyer et qui font partie de vos Mémoires de 1768. J’ai lu avec la plus grande satisfaction vos recherches sur la libration de la Lune ; il me semble que vous les avez poussées aussi loin qu’il est possible et que vous avez presque entièrement épuisé ce sujet ; du moins je ne vois pas, pour le présent, qu’il soit aisé d’ajouter encore quelque chose à votre travail, et j’abandonne le dessein que j’avais depuis longtemps de revenir sur cette matière pour perfectionner la pièce que j’ai composée en 1763. Je suis charmé que vous m’ayez prévenu, d’autant plus que le sujet a infiniment gagné à passer par vos mains. Quant au Mémoire de M. Fontaine, je vous avoue que, malgré mon indifférence ou