Page:Joseph Louis de Lagrange - Œuvres, Tome 13.djvu/248

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ment, et aux bontés desquels j’étais déjà très-redevable. Vous vous moquez, mon cher ami, de craindre que notre nouvelle confraternité ne fasse tort à notre amitié. Vous savez que l’admiration que vos Ouvrages ont excitée en moi a fait naître mon attachement pour vous longtemps avant que j’eusse le bonheur de vous connaître personnellement, et je me flatte que vous ne doutez pas que les marques d’amitié et d’affection que vous m’avez toujours données depuis ne l’aient de plus en plus augmentée. C’est, en vérité, une des plus grandes douceurs de ma vie de penser que je les dois à la personne du monde pour qui j’ai d’ailleurs toute la tendresse, toute l’estime et toute la vénération possibles.

Est-ce qu’il n’y a que les pensionnaires qui aient droit de suffrage dans les élections de votre Académie ? Car sans cela je ne saurais comprendre comment il n’y a eu que dix-sept votants. Je me consolerai aisément de n’avoir pas eu la voix de M. Hérissant, surtout s’il ne me l’a refusée que par un motif aussi honnête et aussi louable que celui que vous me marquez.

Je suis beaucoup plus affligé que surpris de ce que vous me dites des procédés de vos confrères à l’Académie française ; je sais, par expérience, de quoi les corps littéraires sont capables, mais, après tout, je crois que l’envie et la jalousie sont la preuve la plus authentique du mérite, et malheur à celui qui serait hors d’état d’exciter ces sentiments. On a prétendu m’assurer que la place de secrétaire de l’Académie française ne rapportait rien ; je ne puis le croire, quoique je voie, par ce que vous me dites, qu’elle n’est pas aussi avantageuse que je le souhaiterais.

Je serais bien curieux de connaître l’auteur de la pièce qui a eu l’accessit, et qui se croit lésé dans le jugement que l’Académie a porté de son travail. Je vous garderai le secret, si vous l’exigez ; ces sortes de notices[1] ne me sont point indifférentes, parce qu’elles servent à me faire connaître de plus en plus le monde. Je ne sais si notre confrère Euler ne sera pas aussi un peu fâché de ce qu’on l’a fait partager avec moi ; il me semble, à en juger par différents traits, que, depuis qu’il

  1. Notice, renseignement ; dans le sens de l’italien notizia.