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à notre assemblée publique du 25 de ce mois. Il faut bien tuer le temps comme on peut, quand on ne peut pas l’employer comme on veut.

Je compte que vous aurez écrit à M. de Fouchy, comme je vous l’ai recommandé, pour remercier l’Académie ; comme je n’y vais qu’une fois par semaine, j’imagine que votre Lettre aura été lue en mon absence. Vous devez avoir reçu il y a longtemps la Lettre de notre secréfaire qui vous apprend votre élection. Le Roi m’en a paru très-content. Voici ce qu’il m’écrit en date du 30 juin dernier « Vous distribuiez des billets de grand homme à ceux qui se distinguent parmi les nations étrangères. Je suis bien aise que notre La Grange soit de ce nombre ; je suis trop ignorant en Géométrie pour juger de son mérite scientifique, mais je suis assez éclairé pour rendre justice à son caractère plein de douceur et à sa modestie[1]. » Vous voyez, mon cher et illustre ami, qu’on vous rend la justice que vous méritez.

Non, vraiment, il n’y a que les pensionnaires qui aient droit de suffrage dans nos élections. C’est une absurdité à laquelle j’ai tâché en vain de remédier. Imaginez-vous que le marquis de Condorcet et l’abbé Bossut n’ont point voté dans votre élection, tandis que des chimistes et des anatomistes donnaient leur suffrage. Cela est à faire rire. Mais il y a ici bien d’autres sottises plus graves, qui font rire et pleurer tout à la fois.

La place de secrétaire de l’Académie française ne rapporte que 1200 livres, assez mal payées, et un fort vilain logement, que je ne me soucie pas d’occuper, parce qu’il est si triste et si sombre, que j’y mourrais de consomption.

L’auteur qui se croit si lésé dans le jugement du prix est le P. Frisi, avec qui je suis presque brouillé pour ce sujet, et qui a écrit à l’Académie une Lettre passablement impertinente. On ne l’a que trop bien traité, car il y avait des fautes considérables dans sa pièce ; on n’a pas même jugé qu’elle méritât l’accessit, mais seulement qu’on en-fît mention avec éloge, parce qu’en effet il y a beaucoup de travail et quelques

  1. Voir la Lettre entière de Frédéric II dans ses Œuvres, t. XXIV, p. 568.