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DE LAGRANGE AVEC D’ALEMBERT

avec toute la sincérité possible ce que je pense sur l’affaire dont il s’agit. Je suis d’abord très-convaincu que l’Académie ferait une excellente acquisition dans la personne dont vous me parlez ; cette acquisition serait même d’autant plus importante pour elle, que la Classe de Mathématiques est très-mince, n’étant composée que de MM. de Castillon, Bernoulli et moi ; ainsi vous jugez bien que je serais très-charmé et flatté de pouvoir contribuer en quelque manière à rendre ce service à l’Académie et à ma Classe en particulier. Mais 1o je suis bien éloigné de croire que j’aie auprès du Roi le crédit nécessaire pour faire réussir une pareille affaire, et je craindrais même qu’il ne trouvât mauvais que je prisse la liberté de lui en écrire ; 2o je doute fort que l’Académie voulût faire, à ma réquisition, quelque démarche pour cela auprès de Sa Majesté, car je ne pourrais guère compter sur les voix des membres de ma Classe, et encore moins sur celles des autres ; d’ailleurs je ne regarde pas sa recommandation comme fort efficace, puisque, une seule fois qu’elle s’est hasardée à proposer au Roi quelques sujets pour la Classe de Philosophie, elle n’a reçu aucune réponse. Tout bien considéré, je crois que le mieux ce sera que vous proposiez vous-même directement et immédiatement à Sa Majesté la personne en question. Si elle est acceptée, l’affaire est faite, et l’Académie recevra ordre de la mettre au nombre de ses membres et de lui assigner la pension sur sa caisse c’est de quoi j’ai déjà vu plusieurs exemples. Je vous conseillerais même de ne faire aucune mention de moi dans la Lettre que vous écrirez au Roi dans cet objet, et cela pour éviter tout air de cabale, qui ne pourrait que nuire au succès de l’affaire. Voilà, mon cher ami, mon avis sur la meilleure manière de traiter cette affaire. Quant à la pension, je crois comme vous qu’elle ne doit pas être au-dessous de 1000 écus, argent de ce pays, et je compte qu’avec cela votre ami pourra vivre ici aussi bien qu’avec 2000 livres à Paris. Il est vrai que la plupart de mes confrères ont des pensions moindres, mais aussi se plaignent-ils, et je ne voudrais pas qu’il vînt ici augmenter le nombre des mécontents. Comme je n’ai aucune part au maniement des affaires économiques de l’Académie, par la raison que vous pouvez voir à la page 7 de notre der-