Page:Joseph Louis de Lagrange - Œuvres, Tome 13.djvu/264

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nier Volume[1], je ne puis pas vous dire au juste combien sa caisse pourrait encore fournir par an, mais je crois bien qu’elle pourra encore supporter une pension de 1000 écus, et même au delà. Je crois avoir répondu à tous les articles de votre Lettre, mais, comme je m’intéresse véritablement pour la personne que vous désirez de servir, tant à cause de son propre mérite que parce qu’elle est de vos amis, je crois devoir encore ajouter deux mots, pour que vous puissiez prévenir cette personne sur quelques points essentiels : 1o il est très-rare que les académiciens reçoivent des augmentations de pension, quelque bien ou mal qu’ils soient, de sorte que, pour que votre ami ne soit jamais dans le cas de regretter d’être venu ici, il faut qu’il puisse se promettre d’avance d’être toujours également content de ce qu’il obtiendra à son arrivée ; 2o il faut que l’attrait des sciences et l’envie de s’y livrer entièrement soient assez forts en lui pour pouvoir lui tenir lieu des agréments et des avantages qui sont attachés au séjour et à la société de Paris. Toute personne qui peut se suture à elle-même et qui ne veut se mêler que de ce qui la regarde immédiatement peut être assurée de trouver ici toute la tranquillité nécessaire au bonheur d’un philosophe.

Il faut donc que votre ami se tâte bien là-dessus avant de s’engager à rien ; surtout je ne voudrais pas que le dépit de s’être vu préférer à l’Académie[2] un concurrent inférieur en mérite à lui entrât pour la moindre chose dans la résolution qu’il doit prendre ; car, au bout de quelque temps il commencerait à se repentir du parti qu’il aurait pris, surtout envoyant que ceux qui sont actuellement après lui auraient déjà fait leur chemin, tandis que lui en serait toujours au même point. Car, quoique dans votre Académie les pensions viennent assez tard,

  1. « La dernière élection de six sujets, faite le 2 avril 1761, étant demeurée sans confirmation du Roi pendant trois ans, l’Académie reçut une Lettre du marquis d’Argens, en date du 6 janvier 1764, qui portait que l’intention de Sa Majesté était qu’on ne reçût à l’Académie aucun membre, jusqu’à ce qu’elle eût nommé un président, et qu’elle se réservait pour le présent le droit de nommer elle seule, jusqu’à ce temps, tous les membres que l’Académie recevrait. » [Nouveaux Mémoires de l’Académie royale de Berlin, année 1770 (parus en 1772), p. 7-8.]
  2. Voir plus haut, p. 255.