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DE LAGRANGE AVEC D’ALEMBERT

comme je le présume, de lui donner le prix, afin de nous débarrasser enfin de cette théorie de la Lune, qui pourrait bien commencer à ennuyer les savants si nous la tenions plus longtemps sur le tapis. Au pis aller, le prix serait double en 1776, et l’auteur, vraisemblablement, n’y perdrait rien.

J’admire et je respecte, mon cher ami, la modestie avec laquelle vous parlez de vos excellentes productions, tandis que nous avons ici le jésuite Boscovich[1], qui, à force de parler aux femmes de la cour des belles choses qu’il a faites, et que nous ignorons tous deux, s’est fait déjà donner 8000 livres de pension, en attendant mieux, pour avoir, dit-il, un carrosse dont il ne saurait se passer.. Il prétend, de plus, forcer la porte de l’Académie et s’y faire recevoir incessamment, quoiqu’il n’y ait pas même de place vacante ; c’est ce qu’il faudra voir. Vous ét lui êtes une preuve bien sensible de ce que vous me disiez il y a quelque temps, que les prétentions sont en raison inverse du mérite.

J’ai vu ici M. le marquis de Rossignano, votre compatriote, qui vous a vu à Turin, qui me paraît homme d’esprit, et avec lequel j’ai beaucoup parlé de vous. Il pense, ainsi que moi, que vous ferez très-bien de ne quitter Berlin qu’à bonnes enseignes. La patrie est où l’on se trouve heureux et libre.

Dites, je vous prie, à M. Bitaubé que j’attends au premier jour la réponse à la Lettre que je lui ai écrite vers le milieu du mois dernier, et qu’à l’instant j’écrirai les Lettres qu’il désire. Dites-lui aussi que j’ai enfin reçu hier au soir, 5 décembre, son powd me de Guillaume[2], que je vais le lire avec attention et que je lui en parlerai en détail quand je l’aurai lu.

Vous m’avez annoncé, dans votre dernière Lettre, quelques remarques sur mon sixième Volume. Vous me ferez grand plaisir de me les communiquer, à votre grande commodité. Vous savez tout le prix que j’attache à vos observations. Je voudrais savoir ce que vous

  1. Roger-Joseph Boscovich, mathématicien, jésuite, né à Raguse le 18 mai 1711, mort à Milan le 12 février 1787.
  2. Guillaume de Nassau, poème en dix chants, Amsterdam, 1773, in-8o.