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et j’ai peine à croire que celle-ci soit la seule qui puisse avoir lieu dans la nature. D’ailleurs, les phénomènes de la propagation du son ne peuvent s’expliquer qu’en admettant les fonctions discontinues, comme je l’ai prouvé dans ma seconde dissertation.

Je suis fort affligé de ce que vous me dites sur l’impossibilité de votre voyage d’Italie, et je ne renonce qu’avec le plus grand regret à la douce espérance que j’avais conçue de vous revoir bientôt ; mais ce qui est différé n’est pas perdu. Adieu, mon cher et respectable ami ; je vous embrasse de tout mon cœur.


15.

D’ALEMBERT À LAGRANGE.

À Paris, ce 18 juin 1765.

Mon cher et illustre ami, je ne vous parlerai guère aujourd’hui de Géométrie, mais d’une injustice sans exemple que j’essuie et sur laquelle je vous laisse à faire vos réflexions.

Ornari res ipsa negat, contenta doceri.

Clairaut, qui vient de mourir, avait 9000 à 10 000 francs de pension sur différents objets ; on ne m’en a pas donné un sol. Ce n’est pas de quoi je me plains : il y a longtemps que je suis accoutumé à de pareils traitements, et d’ailleurs je n’en ai rien demandé ; mais il laisse à l’Académie une pension vacante qui m’est dévolue de droit, comme au plus ancien : je ne parle point de mes autres titres. L’Académie des Sciences, qui apparemment commence à craindre de me perdre, a écrit au ministre, sans que je l’en aie sollicitée et de son propre mouvement, pour demander cette pension pour moi[1]. Depuis un mois

  1. Les registres manuscrits de l’Académie ne contiennent que la mention suivante, à la date du 18 mai 1765. C’est le Secrétaire perpétuel, Grandjean de Fouchy, qui parle :

    « L’Académie a appris la mort de M. Clairaut, arrivée hier 17 ; à l’occasion de quoi j’ai