Page:Joseph Louis de Lagrange - Œuvres, Tome 7.djvu/225

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presque seule en possession. Ce ne fut que vers le milieu du xvie siècle que des Traités d’Algèbre parurent en France, en Allemagne et ailleurs. Ceux de Peletier et de Buteon, imprimés, l’un en 1554, l’autre en 1559, sont les premiers que la France ait eus sur cette-science.

Tartalea exposa sa solution en mauvais vers italiens, dans un Ouvrage sur différentes questions et inventions, imprimé en 1546, Ouvrage qui a aussi le mérite d’être un des premiers où l’on ait traité de la fortification moderne par bastions.

Cardan publia, dans le même temps, son Traité de Arte magna, c’est-à-dire, de l’Algèbre, où il ne laisse presque rien à désirer sur la résolution des équations du troisième degré. Cardan est encore le premier qui ait aperçu la multiplicité des racines des équations, et leur distinction en positives et négatives ; mais il est surtout connu pour avoir le premier remarqué le cas qu’on appelle irréductible, et dans lequel l’expression réelle des racines est sous une forme imaginaire. Cardan se convainquit, par quelques cas particuliers où l’équation a des diviseurs rationnels, que cette expression n’empêchait pas que les racines n’eussent une valeur réelle ; mais il restait à prouver que non-seulement les racines sont réelles dans le cas irréductible, mais qu’elles ne peuvent même être toutes trois réelles que dans ce cas c’est ce qu’a fait après lui Viète, et surtout Albert Girard, par la considération de la trisection de l’angle.

Nous reviendrons sur le cas irréductible des équations du troisième degré, non-seulement parce qu’il présente une nouvelle forme d’expressions algébriques qui est devenue d’un usage très-étendu dans l’Analyse, mais surtout parce qu’il donne encore lieu tous les jours à des recherches inutiles pour réduire la forme imaginaire à une réelle, et qu’il offre ainsi, en Algèbre, un problème qu’on peut mettre sur la même ligne que les fameux problèmes de la duplication du cube ou de la quadrature du cercle en Géométrie.

Les mathématiciens de ce temps-là étaient dans l’usage de se proposer des problèmes à résoudre : c’étaient des défis publics qu’ils se faisaient, et qui servaient à exciter et à entretenir dans les esprits la