Page:Joseph Marchand - L'Université d'Avignon aux XVIIe et XVIIIe siècles.djvu/293

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toujours ; pendant près d’un siècle, de 1698 à 1790, l’Université put jouir paisiblement de ses privilèges, qui ne furent plus sérieusement contestés. Aussi bien, les docteurs avignonais désarmaient-ils toute critique par leur exacte obéissance aux ordonnances royales et le soin qu’ils prenaient de modeler leur enseignement sur celui des Universités françaises. Même ils proscrivaient de leurs cours et déclaraient indignes de leurs suffrages les étudiants hérétiques, conformément aux dispositions des articles 12, 13 et 14 de l’édit du 13 décembre 1698[1]. Une Université si essentiellement catholique pouvait-elle d’ailleurs se montrer moins rigoureuse, à cet endroit, que les Universités françaises ? Quant aux étrangers qui pouvaient, semble-t-il, échapper aux prescriptions royales, elle hésitait à les dispenser de la scolarité, de peur de « brècher » à ses privilèges[2]. Enfin, comme il convenait à une corporation régnicole et loyaliste, elle prenait une part éclatante aux joies et aux triomphes de la monarchie française, en l’honneur de laquelle elle savait multiplier, au bon moment, les actions de grâces et les Te Deum[3].

Cette heureuse et féconde harmonie fut cependant troublée un moment. On sait qu’à la suite de ses démêlés avec Clément XIII au sujet de l’expulsion des Jésuites, Louis XV fit envahir Avignon et le Comtat. Cette nouvelle « réunion » fut

  1. La déclaration du roi du 13 décembre 1698 ordonnant l’exécution de l’édit de révocation de l’édit de Nantes, portait dans ses art. 12, 13 et 14, que les médecins, chirurgiens et apothicaires appelés auprès des malades devaient en aviser les curés des paroisses et, en cas de négligence, devaient être condamnés à l’amende ou même être interdits. Personne ne devait être reçu dans une charge de judicature, sans une attestation du curé témoignant de leurs bonne vie et mœurs et qu’ils professaient la religion catholique romaine. Les licences ne pouvaient être accordées aux étudiants des Universités que sous des attestations semblables. Délib. du Collège des docteurs du 6 juin 1699. A. V. D 32, fo 132.
  2. Délib. du 4 fév. 1700. A. V. D 32, fo 140.
  3. A. V. D 33, fo 454. Fêtes pour le rétablissement de la santé du roi Louis XV, en 1744.