qu’il a montrés dans ses diverses missions. La première méfiance de l’État-Major est tombée ; il est devenu le favori ; tous, chefs et camarades, le croient de leur bord[1]. Un peu plus tard, Boisdeffre l’avisa de sa prochaine nomination à la place de Sandherr, trop malade pour continuer son service[2].
IV
Déjà, avant le procès de Dreyfus, Cordier s’était aperçu que l’intelligence de Sandherr faiblissait. Le procès acheva le vieux soldat. D’abord, il fut irrité de n’avoir pas découvert lui-même le Juif ; puis, il redouta l’acquittement, bien qu’il eût pris sa part au coup des pièces secrètes ; et, parce qu’il s’y était associé, il resta troublé jusqu’après l’arrêt de revision. « Il est heureux, disait Du Paty, qu’il n’y ait pas eu de vice de forme, car on n’eût pas été sûr d’un second conseil de guerre. » Cette crainte écartée, une autre l’assaillit. Boisdeffre, qui n’ignore rien, ne lui a-t-il pas exprimé l’absurde intention de revenir sur l’affaire[3] ? Sans doute, Boisdeffre croit Dreyfus coupable, il n’est, préoccupé que de découvrir de nouvelles preuves ; surtout, Sandherr, avec Henry, a pris ses précautions en gardant les pièces secrètes dans l’armoire de fer. Le crime, pourtant, est-il à jamais enseveli ? Quand ses amis l’entretenaient de Dreyfus, ils étaient frappés de l’air avec lequel il balbutiait quelques mots[4] ou refusait de parler.