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HISTOIRE DE L’AFFAIRE DREYFUS


ciers du bureau, il n’employa jamais ce procédé[1].

Seulement, quelques jours plus tard, comme Picquart était dans son cabinet, où il examinait le petit bleu, Lauth entre chez lui[2] et, la conversation s’engageant, il répète, essaye, le propos qui lui a été tenu par Henry : « Le document, observe Lauth, n’a aucun signe d’authenticité ; il faudrait qu’il eût une date, un cachet de la poste[3]. » Picquart ne relève pas l’objec-

    1897 ; Instr. Ravary, 15 doc. ; Procès Zola, I, 298.) Picquart dit qu’il a souvent causé avec Gribelin de la manière de faire envoyer des lettres à des espions ; « il est possible que ce soit un de ces souvenirs qui lui soit resté dans l’esprit ». (Procès Zola, I, 330 ; Instr. Fabre, 126.)

  1. Procès Zola, I, 344, Picquart : « Ces messieurs peuvent-ils dire qu’ils ont vu une seule lettre sur laquelle j’aie fait apposer un cachet ? » Lauth, Henry, Gribelin se taisent.
  2. Instr. Tavernier, 5 oct. 1898, Picquart. — Selon Picquart, cette conversation est distincte de celle où il expliqua à Lauth pour quelles raisons il tenait à avoir des épreuves retouchées du petit bleu, sans trace de déchirures. Lauth, au contraire (Enq. Pellieux ; Procès Zola, I, 283 ; etc.), amalgame ces divers entretiens en un seul. Il aurait dit à Picquart : « Mais, enfin, mon colonel, pourquoi tenez-vous tant à faire disparaître ces traces ? — C’est pour pouvoir dire là-haut que je l’ai intercepté à la poste. — Mais cette pièce n’a pas de cachet ! — Croyez-vous qu’on n’en mettrait pas à la poste ? — Oh ! non, ils ne sont pas complaisants. Et puis, en supposant cette lettre interceptée à la poste, toute authenticité disparaîtrait, puisqu’elle n’est pas signée et qu’on ne saurait pas d’où elle vient. — Mais vous seriez là pour certifier que c’est l’écriture de Schwarzkoppen ? — Moi, jamais de la vie ! etc. »
  3. Lauth, à l’enquête Pellieux, prête son propos à Picquart : « Croyez-vous qu’à la poste ils ne consentiraient pas à mettre un cachet ? » (28 nov. 1897.) Puis, à l’instruction Ravary, il prend à son compte la réflexion que le « petit bleu n’a aucun signe d’authenticité ; il faudrait… etc. » (13 déc. 1897.) Picquart rappelle cette déposition de Lauth au procès Zola (I, 298). Lauth en convient : « Il ne me l’a pas proposé ; cette phrase a été dite incidemment, « (I, 283, 331.) Il dépose ensuite dans le même sens aux instructions Fabre et Tavernier et à la Cour de cassation (I, 416), mais avec cette addition que Picquart lui aurait demandé, « de façon incidente, si la chose était faisable ». Enfin à Rennes : « Il ne m’a pas proposé que je fasse mettre un