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HISTOIRE DE L’AFFAIRE DREYFUS


d’administration d’une société financière, ce qui est interdit aux officiers[1].

Esterhazy, maintenant, activait ses démarches pour entrer au ministère. En août, la correspondance de Weil, saisie à la poste, l’avait montré toujours zélé pour les intérêts de son ami. Les généraux Tissayre et Giovaninelli ont promis leur concours ; Saussier marchera : « Je donnerai de vive voix au patron les motifs de mon insistance et lui dirai quels services vous lui avez rendus[2]. » — Esterhazy se vantait d’avoir arrêté les attaques de Drumont, qu’il avait d’ailleurs provoquées lui-même, contre Saussier et Weil. — En septembre, il parut plein de confiance[3] ; il déchanta, en octobre, se crut dupé et écrivit à Jules Roche des lettres tragiques. Ce n’est pas tant pour lui-même qu’il sollicite cette faveur de rester à Paris ; il a pris, lui, son parti, de « l’affreuse position où il se trouve sans l’avoir méritée », de sa ruine financière et « des tristesses d’une vie où les jours heureux ont été si rares » ; mais, s’il insiste encore avec une si tenace importunité, c’est « pour sa femme et ses pauvres petites filles… » Longtemps, par pitié, il a menti à sa femme, « lui laissant croire qu’il était sûr du succès » ; comment lui dissimuler ce nouvel échec ? Et « le médecin dit que toutes ces émotions achèvent la malheureuse, qu’une

  1. Lettre du comte Zogheb : « Votre acceptation écrite sur le prospectus ne vous implique en rien, puisque votre nomination de membre du Conseil ne vous a pas ; été notifiée officiellement. De cette façon, mon cher comte, vous êtes à l’abri de toute éventualité. » (Dossier Tavernier.) Il s’agit de la société the Consolidated Trust of London, Paris and Bruxelles. — Procès Zola, I, 313, Picquart : « Il est interdit aux officiers de faire partie d’un Conseil d’administration. »
  2. D’Ischl, 27 et 28 août 1896. (Dossier Tavernier.)
  3. Rapport de Desvernine, du 15 septembre 1896.