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SCHEURER-KESTNER

Gonse, avec son ordinaire hypocrisie, lui dit seulement « de ne pas s’emporter, de réfléchir[1] ».

Le ton de Picquart était vif ; mais Picquart n’a pas cessé de témoigner à Henry une cordiale confiance ; les mensonges qu’il dénonce, c’est l’évidence qu’il ne l’en rend pas responsable ; Henry est son inférieur hiérarchique ; c’eût été au supérieur, à Gonse, qu’il eût appartenu de répondre.

Sur ces entrefaites, Bertin rapporta à Billot et à Boisdeffre, qui en instruisit Gonse, la conversation qu’il venait d’avoir à Belfort avec Scheurer[2]. Qui renseignait le sénateur alsacien ? Évidemment, d’autres Alsaciens, les Dreyfus, Picquart ? On ne pouvait rien contre les frères du condamné. Il ne serait pas superflu de donner un avertissement au justicier, qu’on avait cru calmé, parce que dépaysé, mais qui continuait ses intrigues.

Henry a achevé son dossier de faux ; le moment semble venu de le brandir.

Il soumit sa réponse à Gonse[3] qui la communiqua à Boisdeffre[4].

  1. Cass., I, 257, Gonse ; Instr. Fabre, 140, Henry. Gonse aurait averti Henry qu’il s’exposait soit à une punition de Picquart, soit à une plainte qui le pourrait mettre dans une situation difficile.
  2. Le 29 mai.
  3. Instr. Fabre, 141, Henry : « Le général me dit : « Envoyez cela, si vous le voulez. » Il dit plus loin : « Mes chefs n’ont en rien épousé notre querelle purement personnelle. » — Cass., I, 257, Gonse.
  4. Instr. Fabre, 61, Boisdeffre : « Je n’ai connu les lettres échangées qu’une fois la chose faite. » 105, Picquart : « Je voudrais savoir si c’est après que la lettre d’Henry a été écrite ou après qu’elle a été envoyée, car quatre jours se sont écoulés entre les deux opérations. » — Cass., I, 214, Boisdeffre : « Je n’ai connu l’échange de lettres qu’après réponse faite. »