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LA COLLUSION


tard, il dit qu’il le reçut seulement la veille du jour où il le restitua[1]. Quand il renonça à la dame voilée, il fabriqua un autre roman : « Du Paty lui a remis le document le soir même, à la nuit, si bien qu’il n’a pas pu en prendre connaissance et qu’il dut entrer dans un cabaret du voisinage pour fermer et sceller le pli[2]. » Dans la journée, un billet, de l’écriture de la marquise Du Paty, lui avait enjoint de restituer immédiatement la pièce « dont réception lui sera officiellement accusée[3] ». Tantôt il a rapporté la pièce vers le soir, tantôt dans la nuit[4]. Mais c’est toujours à l’Esplanade des Invalides qu’il l’aurait reçue, soit de la dame voilée[5], soit de Du Paty[6], c’est-à-dire près des lieux mêmes où s’était passée, autrefois, une scène analogue entre le marquis et les Comminges. Du Paty, pour avoir admis que Picquart avait volé un document secret, souffrira de la même injuste accusation ; et pour avoir cru à l’existence de la protectrice inconnue d’Esterhazy, il deviendra lui-même « la dame

    vous… » et finissait par « Alessandra ». C’est tout ce que, pour l’instant, je puis vous dire. » (Cass., III, 108,)

  1. Cass., II, 248 (Enq. Bertulus), Esterhazy.
  2. Récit fait par Esterhazy à Christian (Cass., 231). Ici encore, il y a des variantes : tantôt Marguerite Pays a assisté à la scène (récit à Christian) ; tantôt elle n’y a pas assisté (Cass., II, 247, Esterhazy). — Juridiquement, toute l’accusation portée contre Du Paty repose sur les récits d’Esterhazy et de la fille Pays à Christian, et sur les suppositions de Picquart et de Mlle de Comminges.
  3. Dans sa déposition à Londres, devant le consul (22 février 1900), il dit que l’ordre de restituer lui fut donné verbalement par Du Paty ; dans l’édition belge, qu’il reçut un billet de la marquise Du Paty ; dans l’édition de Paris (8), il dit simplement qu’il reçut l’ordre.
  4. Instr. Tavernier, 21 juillet, Du Paty ; « Il a varié dans l’indication de l’heure jusqu’à ce qu’il ait été mis au point. »
  5. Enq. Pellieux ; Instr. Ravary, etc.
  6. Cass., I, 583 ; Dép. à Londres.


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