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HISTOIRE DE L’AFFAIRE DREYFUS

L’accusateur, ayant ainsi parlé, céda tranquillement la place à l’accusé.


IX

Dès le lendemain, Picquart, arrivé du matin, déposa devant Pellieux.

À Tunis, la veille de son départ, des camarades, le fils du général de La Roque, lui avaient donné spontanément des renseignements sur Esterhazy. À bord du bateau qui l’amena, il ne causa avec personne. À Marseille, il écarta les journalistes qui le guettaient. Un officier, envoyé à sa rencontre, l’accompagna à Paris[1].

Laissé par Leblois dans l’ignorance de l’entreprise que l’avocat avait combinée avec Scheurer[2], et sans autres informations que celles des journaux, puisqu’Henry, depuis deux semaines, interceptait son courrier[3], il cherchait à reconstituer les événements qui le mettaient en cause et comprenait seulement qu’Esterhazy et ses protecteurs étaient partis en guerre contre lui. Vraiment, Leblois, avant d’agir, eût pu le

  1. Procès Zola, I, 295, 310, Picquart.
  2. Instr. Fabre, 181, Leblois : « J’ai agi conformément à l’Intérêt du colonel Picquart ; mais je ne puis pas dire que j’ai agi conformément à ses désirs. Il aurait pu se dispenser, s’il l’avait voulu, de dire, devant la Cour d’assises, qu’il approuvait complètement ce que j’avais fait ; il lui aurait suffi de dire qu’il ne me désapprouvait pas. Je ne lui ai fait part du résultat de mes démarches qu’en décembre 1897. » — Picquart : « J’ai donné un mandat à Leblois et il l’a rempli comme il l’a entendu. » (Instr. Fabre, 1) — Quand le frère de Leblois était venu à Tunis, le général Leclerc avait demandé à Picquart sa parole d’honneur de ne pas voir cet officier.
  3. Procès Zola, I, 292, Picquart.